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7.7. La gestion du changement

Héraclite d’Éphèse disait : « Rien n’est aussi constant que le changement ». Le climat des affaires d’aujourd’hui est en constante évolution et est intraitable. Les entreprises s’adaptent aux changements ou font faillite. Le changement est une réalité de la vie.

Pensons aux saisons. Chaque année, l’été se transforme en automne, la température baisse et les feuilles se transforment et changent de couleur, finissant par tomber des arbres.

Mais tous les types de changement organisationnel ne sont pas aussi évidents, routiniers ou gracieux. Le changement peut être parfois aussi inévitable que la météo changeante, mais cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y a pas de moyens d’assurer un changement organisationnel réussi dans votre entreprise.

Quiconque cherche l’origine de la « gestion du changement » devra se tourner vers les Etats-Unis. Peu après la seconde guerre mondiale, le psychologue américain d’origine allemande Kurt Lewin a développé pour la première fois au MIT un concept théorique organisationnel systématique pour mettre en œuvre un changement social planifié dans les organisations et les entreprises.

L’idée sous-jacente se reflète dans la procédure à trois étapes, qui consiste en une phase de décongélation (dégel), suivie d’une phase de déplacement (changement) puis d’une phase de recongélation (nouvelle congélation).

Nous vivons dans un monde VUCA (volatil, incertain, complexe et ambigu). Nous vivons dans une ère numérique où il est essentiel de croître constamment en adéquation avec les avancées technologiques.

Le rythme et la structure de nos vies et du monde des affaires d’aujourd’hui évoluent rapidement et continuellement. Une réticence à changer avec le temps peut laisser les organisations coincées dans le passé. Les théoriciens et praticiens du changement sont confrontés à un changement chaque jour plus important, plus rapide et plus complexe.

« Le secret du changement est de concentrer toute votre énergie non pas sur la lutte contre l’ancien, mais sur la construction du nouveau. »

Socrate

En conséquence de quoi, la gestion du changement se voit attribuer une priorité élevée dans les préoccupations des entreprises.

La gestion du changement organisationnel fait référence aux actions entreprises par une entreprise pour modifier ou ajuster une composante importante de son organisation. Il peut s’agir de la culture d’entreprise, de la technologie, des processus internes, du mode de leadership, de la hiérarchie de l’entreprise ou un autre aspect critique.

Mais avant de parler de gestion du changement, qu’est-ce que le changement en lui-même ?

7.7.1. D’abord, qu’est-ce que le changement ?

Le point de départ de tout projet de gestion du changement doit être une définition claire et convaincante du changement en lui-même. Cela est vrai autant pour un changement commercial que pour un changement d’envergure tel qu’une acquisition d’entreprise ou un changement transformationnel affectant l’ensemble de l’organisation.

Cela peut paraître évident, mais cette première étape essentielle est trop souvent oubliée dans l’agitation d’un changement organisationnel dans le monde réel.

Le changement est souvent défini comme un état ou l’on devient diffèrent. C’est le passage d’un état actuel vers un état futur, à travers une période de transition. Le changement est cette transition générale de quelque chose actuelle ou d’une phase actuelle vers un autre état futur. Cela implique un mouvement vers un objectif, un état idéalisé ou une vision de ce qui devrait être et un éloignement des conditions, croyances ou attitudes présentes.

Fig. Les différentes étapes du changement

Le changement est sans fin, il est permanent, il se produit dans notre vie de tous les jours, dans nos vies familiales, au sein de nos communautés et au travail. Cela peut être un éloignement radical de ce que nous sommes, comme cela peut concerner quelque chose de mineur, cela peut être inattendu ou très attendu.

Dans tous les cas, il s’agit d’un mouvement entre trois états – le présent, une transition et le futur. Ces trois états apparaissent abondamment dans la littérature sur la gestion du changement et dans d’autres disciplines.

S’agissant d’une entreprise,  il peut par exemple s’agir :

  • D’un changement de technologie
  • D’une fusion ou une acquisition
  • De la mise sur le marché d’un nouveau produit
  • D’une introduction de nouveaux équipements dans les processus de fabrication

Ces exemples ont tous un état actuel clair et un état futur clair. Dans le cas d’une fusion avec une autre organisation, vous êtes actuellement deux sociétés distinctes, mais à l’avenir, vous ne ferez qu’une seule entité. C’est un changement majeur qui supposer des outils, des procédures, des ressources, des comportements et des réflexes. Chaque changement organisationnel affectera de près ou de loin les employés. 

Afin de bien définir le changement, vous devez identifier l’écart de comportement entre l’état actuel et l’état futur. Pour ce faire, quatre questions doivent être posées :

Qu’est-ce qui change ? La réponse à cette question définit l’état dans lequel vous êtes aujourd’hui, d’où vous partez (l’état actuel) et vers quoi vous souhaitez tendre, vous souhaitez vous dirigez (l’état futur). Plus important encore, il répond à quoi ressemblera le succès lorsque vous parviendrais à concrétiser le dit changement.

Pourquoi changez-vous ? Répondre à cette question définit la raison qui a conduit à vouloir un changement. La première question que les gens posent généralement lorsqu’ils entendent parler d’un changement est : le WIIFM (What’s in it for me?) « Qu’est-ce que j’y gagne ? » Qu’est-ce que le changement va m’apporter  et « Qu’est-ce que ce changement signifie pour moi dans mon travail ? » Ces questions ne concernent pas uniquement les niveaux inférieurs de l’organisation mais davantage le top management.

Quelles sont les conséquences de ne pas changer ? La réponse à cette question définit en termes commerciaux et humains les inconvénients ou les risques encourus en refusant le changement.

Comment le succès sera-t-il mesuré ? Comment les progrès seront-ils surveillés, appréciés et mesurés ? Quels délais seront attachés à ces mesures ?

Mais quels sont les facteurs internes ou externes qui sont susceptibles de nécessiter des changements.

Parmi les principaux éléments ou forces qui créent le besoin de changement on peut citer :

  • Environnement politique, économique et juridique
  • Introduction de structures organisationnelles agiles
  • Technologie
  • Optimisation de l’organisation et des processus métiers
  • Opportunités et menaces
  • Changement ou adaptation des stratégies d’entreprise
  • Modification de la structure existante
  • Restructuration du personnel
  • Conditions du marché
  • Modification des attentes des employés
  • Crises et urgences
  • Pression sur les coûts
  • Mondialisation et déploiement mondial
  • Changements sociaux
  • Digitalisation des processus métiers

« Votre succès dans la vie n’est pas basé sur votre capacité à simplement changer. Il est basé sur votre capacité à changer plus rapidement que vos concurrents, vos clients et votre entreprise. »

Mark Sanborn. auteur, conférencier professionnel et entrepreneur. très connu pour son livre The Fred Factor, best-seller du New York Times, du  Wall Street Journal, et de USA Today

7.7.2. Les niveaux de changements

Pour clarifier une approche en évolution rapide, la conduite du changement peut être envisagée à trois niveaux distincts :

  • Le niveau individuel
  • Le niveau du projet
  • Le niveau de l’organisation

En scindant votre stratégie de gestion du changement à travers ces trois catégories, vous obtiendrez une vision claire et simple.

Examinons ce que chacun de ces termes représente.

Changement au niveau individuel : Pour qu’une organisation réussisse dans son projet de changement, les individus doivent changer. Le succès de chaque projet repose en définitive sur le fait que chaque employé impacté fait son travail différemment.

Par exemple, changement d’affectation professionnelle, un déménagement géographique dans un autre lieu, un changement d’attitude et de personnalité de la personne. Les changements significatifs au niveau individuel ont des répercussions sur le groupe auquel l’individu appartient et ensuite sur l’organisation.

Le changement n’est réussi que lorsque chaque membre du personnel est à bord et sur « le pont », ils doivent donc être conscients du changement, le désirer et savoir quel rôle jouer en son sein. Les organisations doivent aider les employés dans leur propre cheminement de changement personnel.

Changement au niveau de l’organisation : Pour réussir dans un environnement de changement rapide et continuel, une entreprise doit renforcer sa capacité de changement. La gestion du changement doit être la norme sur tous les projets et les processus de changement sont continuellement mis à jour et appliqués dans toute l’entreprise. Tous les membres de l’organisation sont concernés.

Du sommet de l’organisation jusqu’aux personnels de la première ligne doivent connaître et remplir leurs rôles dans la conduite du changement. Faire de la gestion du changement une capacité de base apporte un succès indéniable à l’organisation.

Exemples de changements pour l’organisation : Pénétration d’un nouveau marché, adoption d’une nouvelle activité, changement d’objectifs et de stratégies, changement de leadership, coentreprise, fusion. Ces grands changements dans l’organisation sont nécessaires pour s’adapter aux changements environnementaux.

Changement au niveau du projet : Alors que le changement individuel se produit au niveau d’une personne à la fois, la gestion du changement au niveau du projet peut aider à faciliter ce changement entre les groupes. Ici, vous vous préparez au changement, gérez le processus et renforcez enfin le changement pris.

A ce niveau, il peut s’agir par exemple d’un changement dans le flux de travail, de la conception du travail, du mode de communication. Le groupe détient une grande influence sur l’individu. Les groupes informels et formels peuvent résister au changement. Retenons toutefois que la mise en œuvre efficace du changement au niveau du groupe peut surmonter la résistance au niveau individuel.

Par ailleurs, chaque changement organisationnel a des impacts individuels sur les dizaines, centaines ou milliers d’employés qui doivent faire leur travail différemment lorsqu’ils adoptent la solution. C’est là qu’intervient la gestion du changement.

« Cela semble toujours impossible jusqu’à ce que ce soit fait. »

Nelson Mandela

7.7.3. Qu’est-ce que la gestion du changement ?

Si le changement consiste à passer à un état futur, la gestion du changement consiste à soutenir les employés touchés par ce changement lors de leurs transitions individuelles de leur état actuel à leur état futur.

Le changement organisationnel se produit lorsqu’une organisation transforme sa structure, ses stratégies, ses méthodes, sa culture et d’autres éléments pour réorganiser et se restructurer.

C’est aussi la discipline qui guide la manière dont nous nous préparons, équipons et aidons les individus à adopter avec succès le changement afin de favoriser la réussite et les résultats de l’organisation.  Cela va consister à soutenir les employés individuels pendant la transition de l’état organisationnel et à les soutenir dans leurs propres transitions personnelles. 

Certains employés accepteront le changement, tandis que d’autres peuvent être assez réticents; certains seront ravis et motivés, d’autres peuvent être furieux et mécontents. Certains employés s’adapteront rapidement au changement; tandis que pour d’autres, cela peut prendre un certain temps.

On pourra même rencontrer des d’employés qui refusent tout simplement d’accepter le changement. La gestion du changement fournit les outils, les processus et les principes nécessaires pour soutenir ces personnes à travers leur propre expérience personnelle du changement et pour mieux s’adapter à leur environnement changeant.

Pour suivre les changements politiques, économiques ou technologiques et prospérer au 21e siècle, les organisations doivent disposer d’une gestion appropriée du changement. Les changements qui vont se produire au sein de notre organisation exigeront la mise en œuvre de nouvelles approches du fonctionnement des employés. 

Pour atteindre les états futurs souhaités par l’organisation, les individus devront peut-être travailler différemment. Le succès assuré et durable des changements dépendra de chaque individu atteignant son propre état futur personnel et c’est là que nous nous rendons compote du lien entre les changements organisationnels et la gestion du changement.

La gestion du changement est ainsi le processus consistant à guider le changement organisationnel jusqu’à sa réalisation, depuis les premières étapes de la conception et de la préparation, jusqu’à la mise en œuvre et, enfin, jusqu’à l’atteinte des objectifs visés par le changement.

Quelques caractéristiques du changement :

  • Le changement devient aujourd’hui inévitable.
  • Il résulte de forces autant extérieures qu’intérieures.
  • Un changement dans une partie de l’organisation a des impacts sur l’ensemble de l’organisation. Par exemple, tout changement dans la fonction production aura des répercussions sur les fonctions marketing, financière, ressources humaines etc.
  • Le changement affecte toutes les parties de l’organisation, même si c’est à des degrés, des importances et des vitesses
  • Le changement a souvent des effets sur les personnes, le processus de travail, l’environnement de travail, la structure, la technologie, la politique d’organisation ainsi que d’autres éléments de l’organisation.
  • Il s’agit d’un phénomène

PAROLES DE FEMMES

« Un changement puissant et soutenu nécessite une communication constante, non seulement tout au long du déploiement, mais une fois que les principaux éléments du plan sont en place. Plus il y a de types de communication utilisés, plus ils sont efficaces. » 

DeAnne Aguirre, associée principale chez Strategy&

Les changements et la gestion du changement sont pour la plupart le résultat de réorientations stratégiques majeures d’une organisation ou d’une entreprise, ce que l’on appelle des tournants stratégiques. 

Cela peut donc concerner de nouveaux marchés à conquérir, de technologies qui vont révolutionner votre modèle commercial, d’une entreprise à acheter, de nouveaux produits à introduire sur le marché ou encore d’une réduction indispensable de couts de production.

Le changement est une caractéristique centrale de toutes les entreprises. Mais certaines évitent le changement et ne réagissent au changement que lorsqu’il n’y a pas d’autre moyen de s’en sortir. D’autres entreprises au contraire, se préparent tôt, changent en permanence et gèrent le changement de manière proactive et prévoyante. 

7.7.4. L’indispensable adhésion des employés

Bien que cela soit parfois considéré comme le côté « soft » du changement, la gestion des aspects humains d’un changement est souvent l’élément le plus difficile et le plus critique d’une transformation organisationnelle. La gestion des ressources humaines favorise un changement holistique et réussi.

La gestion du changement est une approche structurée et intentionnelle visant à soutenir les personnes à travers le changement. Elle prépare, équipe et soutient les individus à travers les changements dans leur travail. En mettant l’accent sur la mobilisation de l’adoption et de l’utilisation, le changement.

Lorsque nous définissons la gestion du changement, nous la reconnaissons à la fois comme un processus et une compétence. Une compétence à savoir associer les autres.

La création d’une nouvelle organisation, une réduction des couts, la conception de nouveaux processus de travail ou la mise en œuvre de nouvelles technologies peuvent ne jamais voir leur plein potentiel voire ne jamais aboutir si vous ignorez votre personnel. C’est parce que la réussite financière ou la réussite tout court dépend du degré d’adhésion des individus au sein de l’organisation au changement.

La gestion du changement est justement une application d’un processus structuré et d’un ensemble d’outils et méthodes pour diriger le côté humain du changement afin d’atteindre le résultat souhaité. En fin de compte, la gestion du changement se concentre sur la façon d’aider les gens à s’engager, à s’approprier, à adopter et à utiliser un changement dans leur travail quotidien.

Dans des situations pareilles, il ne suffit pas de planifier la nouvelle stratégie qui découle des changements envisagés et de l’annoncer aux cadres et employés de l’entreprise. 

Tous ces cadres et employés doivent nécessairement changer leur comportement, intérioriser de nouvelles valeurs, accomplir de nouvelles tâches, la culture d’entreprise doit changer, les systèmes de gestion, les règles, les structures salariales et la technologie doivent être adaptés. Un tournant stratégique entraîne des changements profonds dans une entreprise.

La gestion du changement doit contribuer de manière significative à garantir que les employés acquièrent une attitude positive vis-à-vis du changement. Par-dessus tout, les employés ont besoin d’être orientés vers la pensée et le comportement souhaités dont l’entreprise a besoin.

Pour qu’une initiative ou un projet de changement réussisse, cela dépend de l’acceptation effective du changement par les employés.

Pour que la volonté d’apprendre et d’adopter de nouveaux comportements mieux adaptés aux nouvelles circonstances soit aussi élevée que possible, ils doivent être impliqués dans le changement. En leur donnant l’opportunité de participer activement au changement, ils développent un plus grand engagement, une plus grande motivation. Ainsi, la gestion du changement est l’outil essentiel pour livrer les résultats et nous faire passer de notre état actuel à notre état futur.

Tout le monde doit se convaincre que faire l’économie de ces changements individuels qui doivent accompagner et sous-tendre le changement de l’organisation, peut conduire à un échec cuisant.

HISTOIRES A MÉDITER

LE VELO A CERVEAU INVERSÉ

Le « vélo à cerveau inversé » a été la création peut être plus saugrenue qu’imaginative d’un soudeur, comme un défi pour  ceux qui voulaient s’aventurer.

Lorsque vous conduisez un vélo à cerveau inversé, vous devez tourner le guidon vers la gauche pour aller à droite et vers la droite pour aller à gauche.

Karen Stanton, directrice mondiale de la marque et du marketing chez IFF (International Flavors and Fragrances), a acheté un vélo cérébral inversé et l’a apporté à son entreprise pour illustrer quelques réunions sur le changement organisationnel.

Au début de chaque réunion, elle roulait sur le vélo et n’y arrivant pas, elle déposait 50 $ sur une table à l’entrée de la salle.

Elle expliquait le concept du vélo en lançant un défi en annonçant: « Quiconque peut conduire ce vélo reçoit 50 $ »

Chaque fois qu’elle lançait ce défi, il y avait beaucoup de volontaires, mais personne n’a réussi à conduire ce vélo. Le concept était simple à comprendre mais difficile à mettre en pratique. Cela allait à l’encontre de l’instinct.

Karen utilisait le vélo comme exemple de la difficulté du changement. Elle expliquait que même si nous pouvons comprendre quelque chose sur le plan cognitif, cela ne signifiait pas pour autant que notre comportement va changer.

La réponse à éviter n’est pas de croire ou supposer qu’un changement est trop difficile et décider de l’abandonner, mais de laisser du temps au temps. Le temps de la pratique.

La seule personne qui a réussi à conduire le vélo à l’envers de Karen était le fils d’un de ses collègues. Il a passé environ une heure à se faire une idée du vélo, puis a pu le conduire.

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