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9.11. Les styles de résolution des conflits

Les conflits soit une partie normale et naturelle de tout lieu de travail. Certains d’entre eux sont fortement souhaitables car facteurs de motivation qui génèrent de nouvelles idées et de l’innovation, qui conduisent à une flexibilité accrue et à une meilleure compréhension des relations de travail.

Il n’en demeure pas moins que s’ils ne sont pas résolus de manière appropriée et en temps voulu, ils peuvent entraîner de la démotivation, de l’absentéisme, une perte de productivité, s’envenimer et affecter le moral collectif, les relations interpersonnelles et la productivité au travail, voire même des problèmes de santé mentale, burnout et autres préjudices.

Dès lors, les conflits doivent être gérés efficacement afin de contribuer au succès des organisations. Mais, en matière de conflits, il n’y a pas de solution unique qui fonctionne dans toutes les situations. Chaque situation est différente, de ce qui a déclenché le conflit aux parties impliquées.

Un leader expérimenté dans la résolution de conflits devrait être capable d’avoir une vue d’ensemble du conflit et d’appliquer le style de gestion de conflit qui est requis dans la situation spécifique. Cette compétence de gestion clé implique l’utilisation de différentes tactiques en fonction de la situation.

Avec un conflit correctement géré, une organisation est en mesure de minimiser les problèmes interpersonnels, d’améliorer la satisfaction des clients et de produire de meilleurs résultats commerciaux.

9.11.1. Les modes de résolution des conflits

Il y a lieu d’abord de préciser qu’un conflit dans le milieu de travail même si c’est souvent le cas, ne signifie pas nécessairement qu’il y a eu une faute de la part d’une des parties en conflit.

Il existe des situations où des employés, cherchant la réussite de l’organisation, et, satisfaisant d’un niveau élevé d’engagement, rejettent le statuquo et poussent pour des changements. Ils peuvent ainsi entrer en conflit avec des parties qui se complaisent dans la situation actuelle, qui peuvent changer car il les dérangerait dans leur confort.

En matière de conflit, il n’y a pas de solution unique qui fonctionnera dans toutes les situations. La résolution des conflits visant à résoudre un phénomène constitué de points de vue, de décisions ou de besoins contradictoires d’individus ou de groupes, chaque situation sera différente et fonction du type de facteur ayant évoqué le conflit ou encore des parties concernées.

On ne peut pas dire qu’il y ait une seule et bonne méthode pour gérer les conflits, applicable en toutes circonstances.

Croire par exemple, que tout conflit doit se régler par la collaboration, c’est se leurrer et s’exposer à de graves erreurs. Le type de conflit soulevé, le contexte dans lequel il apparaît, les responsabilités induites, les enjeux résultant des conflits, le comportement et le pouvoir des parties, l’interdépendance qui les uni, le degré de rationalité qu’elles affichent, autant d’ éléments qui peuvent motiver telle solution ou conditionner telle attitude.

« Pour rendre la vie plus supportable et agréable pour tout le monde, choisissez les problèmes qui sont suffisamment importants pour se battre, et ignorez ou distrayez vous avec ceux que vous trouvez accessoire ce jour-là. Choisir vos batailles éliminera un certain nombre de conflits, et pourtant vous laissera toujours le contrôle. »

Laurent Balter

Il existe par exemple des cas où la rupture est à privilégier par rapport à la collaboration ou l’évitement du conflit. Si nous prenons le cas d’un employé visiblement improductif en dépit de tous les moyens mis à sa disposition, qui s’absente sans raison, qui démotive ses collègues par ses comportements nuisibles, manifeste il n’y a pas d’autres solutions que la séparation et la cessation de la relation de travail.

Si maintenant, on estime que le dit employé a des chances de s’amender, et qu’il affiche une volonté de se remettre en cause pour s’améliorer, la collaboration est peut-être alors, la meilleure des solutions.

Ainsi, les managers disposent d’un large spectre de solutions pour gérer les conflits, allant de la confrontation jusqu’à la collaboration en passant par la négociation ou le compromis. Parfois même, un conflit peut déjà comporter en son sein, divers ingrédients dont certains se prêtent à la collaboration et d’autres à la confrontation.

9.11.2. Le modèle de Thomas-Kilmann de résolution des conflits

Plusieurs modèles ont été élaborés pour cerner la réalité des conflits. Ces modèles ont étudié tantôt la structure des conflits et tantôt le processus. Dans les années 1970, les chercheurs Kenneth Thomas et Ralph Kilmann ont développé un modèle de résolution des conflits.

Dans ce modèle, le terme « conflit » est décrit comme la condition au sein de laquelle les préoccupations d’une partie ne peuvent être compatibles avec les préoccupations de l’autre. Si deux ou plusieurs personnes ou groupes se préoccupent de choses qui sont contradictoires, alors le résultat est un conflit.

Ce modèle fait ressortir deux dimensions fondamentales. La première, la recherche de la satisfaction de ses propres intérêts, étalée sur l’axe des ordonnées du graphique représente le degré de détermination à ne rechercher que la satisfaction de ses propres intérêts sans trop se soucier de ceux des autres. La seconde, étalée sur l’axe des abscisses du graphique est le degré de coopération, et la recherche de la satisfaction des préoccupations des autres.

Le modèle de Thomas-Kilmann fait ressortir cinq grands types de comportement adoptés en situation conflictuelle : la confrontation, l’évitement, l’accommodation,

Fig. Styles de gestion des conflits selon Thomas-Kilmann

9.11.2.1. La confrontation

En haut à gauche dans le graphique, nous avons une forte détermination à satisfaire ses besoins et préoccupations et un faible envie de coopération avec la partie adverse.

C’est un mode axé sur la puissance. Il rejette les compromis et implique de ne pas céder aux points de vue ou aux désirs des autres. C’est d’abord et avant tout le désir d’obtenir gain de cause, de satisfaire ses intérêts dans une situation conflictuelle et ce, envers ou en dépit des intérêts de l’autre.

Dans cette situation, nous estimons que la confrontation est la meilleure alternative à la résolution du conflit. Une partie reste ferme dans ce qu’elle pense être la bonne gestion d’une situation et ne recule pas tant qu’elle n’a pas réussi.

Ce comportement s’exprime de différentes manières et englobe diverses tactiques incluant l’argumentation, les promesses, les menaces, l’engagement irrévocable, la manipulation et l’utilisation de la force physique ou morale.

Cette stratégie n’est pas aussi diabolique qu’il n’y paraît. Ce mode peut être plus adapté lorsque nous avons besoin d’une résolution rapide et que nous sommes dans une position de pouvoir plus élevée. 

Il est également impératif d’utiliser ce mode lorsque nous devons prendre des décisions urgentes. Il peut résoudre rapidement les différends, mais il y a de fortes chances que le moral et la productivité soient amoindris. Ce n’est pas un style sur lequel il faut fortement compter et à ne réserver qu’à des situations particulières.

9.11.2.2. L’évitement

En bas, à gauche, nous sommes dans une situation où notre détermination à défendre nos intérêts n’est pas vraiment à toute épreuve, de même que nous ne sommes pas vraiment disposés à coopérer avec les autres. L’individu ne veut ni aborder ses propres problèmes ni les problèmes des autres. Cela signifie finalement qu’ils ne veulent pas du tout s’engager dans le conflit.

 L’évitement ou la fuite est peut-être la plus ancienne forme de résolution de conflit et remonte à une époque où les humains avaient le choix entre fuir ou se faire « dévorer » face à une menace. La forme moderne d’évasion de nos jours consiste à : détourner le regard, se retirer, quitter la pièce ou simplement éviter les causes possibles de conflit.

« Plus nous fuyons le conflit, plus il nous domine ; plus nous essayons de l’éviter, plus il nous contrôle ; moins nous craignons le conflit, moins il nous embrouille ; moins nous nions nos différences, moins elles nous divisent. »

David Augsburg

Il y a certaines personnes qui, de par leur personnalité ou leur tempérament, refusent de s’engager ou de s’impliquer dans un conflit. De la même manière, quel que soit notre caractère ou nos habitudes, il se présente des situations où, pour différentes considérations tactiques, émotives ou autres, il nous apparaît préférable de se tenir à l’écart du conflit. On adopte ainsi un comportement d’évitement.

Ce mode reflète la passivité dans la gestion des conflits. Ce style vise à résoudre donc le conflit en l’ignorant, en éliminant les parties en conflit ou en l’évitant d’une manière ou d’une autre. Les membres de l’équipe en conflit peuvent être séparées, réaffectés à d’autres structures ou encore retirés du projet sur lequel ils sont en conflit.

Même si, d’un point de vue idéal, nous serions d’accord pour dire qu’il est efficace d’affronter les problèmes de front, nous avons tous, même les plus courageux d’entre nous, été dans des situations où l’on se dit qu’il vaut mieux éviter la confrontation. De plus, certains problèmes sont si triviaux qu’ils ne méritent pas qu’on y consacre notre temps.

L’évitement est caractérisé par une absence d’implication dans une  situation  conflictuelle. C’est un refus stratégique ou non, de s’engager. Il se manifeste essentiellement de deux façons soit par l’inaction ou encore par le retrait.

Cela peut être un style de résolution de conflit utile lorsque la personne estime qu’elle a besoin d’une période de récupération après avoir connu récemment un autre conflit ou si elle pense avoir besoin de plus de temps pour réfléchir à sa position sur le conflit lui-même.

Certains considèrent que cela peut absolument avoir un sens si l’adversaire est nettement plus puissant et que c’est la meilleure attitude à adopter. Résoudre le conflit en fuyant peut être une stratégie de survie.

Cependant, l’évitement ne doit pas se substituer à une résolution appropriée. Repousser le conflit indéfiniment peut conduire à envenimer davantage le conflit et encouragera l’apparition de nouveaux conflits

9.11.2.3. L’accommodement

En bas et à droite dans le graphique, on s’oriente progressivement vers des modes plus amiables de règlement des conflits. C’est un petit peu le contraire de la position de confrontation. L’hébergement ou la démission se manifeste par le désir de satisfaire les intérêts de l’autre et ce, même au détriment de ses propres besoins.

Nous sacrifions notre propre position pour rendre l’autre partie heureuse. Le modèle de conflit de Thomas et Kilmann positionne ce mode comme étant élevé en termes de coopération et faible en termes d’affirmation de soi. 

La personne n’est pas très inclinée à satisfaire ses propres intérêts et est par contre dotée d’une forte détermination à défendre les préoccupations des autres. Ce style consiste simplement à faire passer les besoins des autres parties avant les siens.

Parfois, l’accommodement vous obligerait à suivre les ordres d’une autre personne alors que cela va à l’encontre de vos souhaits. C’est par exemple le cas d’un employeur qui sollicite un travailleur pour effectuer des heures supplémentaires à un moment tout à fait inopportun (l’employé ayant par exemple un rendez-vous chez son dentiste). Celui-ci peut contester la décision et refuser d’obtempérer à l’ordre. Mais il peut aussi se résigner et obéir simplement à la consigne. C’est dans ce dernier cas un comportement d’accommodement.

L’essence de cette stratégie est la passivité, les concessions, le désir « d’arranger » l’autre partie. Vous lui permettez de « gagner » et d’obtenir ce qu’elle veut. Nous abandonnons nos besoins, nous préférons « arrondir les angles », adoucir la situation. L’accommodement peut aussi prendre la forme d’une libéralité ou d’une charité désintéressée, de l’obéissance à une autre personne même si vous ne voulez pas vraiment l’écouter.

Cette option, que certaines désignent comme une « démission », consiste à maintenir la paix, à ne pas réussir plus d’efforts que le que la banalité du problème n’en exige et à savoir quand choisir « ses » batailles.

Bien qu’il puisse sembler quelque chose de peu faible, l’accommodement peut être le meilleur choix absolu pour résoudre un petit conflit et passer à des problèmes plus importants.

9.11.2.4. La collaboration

En haut et à droite dans le graphique, la personne a autant le désir de satisfaire ses propres intérêts que ceux des autres. Collaborateur, c’est avant tout exprimer sa volonté de satisfaire ses intérêts et ceux des autres parties au conflit ainsi que de combler les besoins de tous.

La collaboration consiste à travailler avec l’autre partie pour trouver une solution mutuellement acceptable à un problème. C’est en quelque sorte la préoccupation d’un gain mutuel. (gagnant-gagnant). Ce comportement est souvent adopté lorsqu’il est vital de préserver la relation entre toutes les parties.

Cela implique souvent que toutes les parties s’associent ensemble, discutent du conflit et négocient ensemble une solution. Cela commence généralement, par une discussion à travers laquelle chaque partie essaie de comprendre le point de vue de l’autre.

Cela conduit ensuite à une analyse plus approfondie de la situation au cours de laquelle nous essayons aussi de comprendre les attentes des uns et des autres. Enfin, nous arrivons à une solution où les deux parties sont bénéficiaires.

PAROLES DE FEMMES

« L’une des meilleures choses que vous pourriez faire est de vous arrêter et d’écouter ; c’est pourquoi il est bon de ne pas simplement répondre immédiatement lorsque quelqu’un vous parle. Arrêtez-vous et spécifiez-vous d’avoir intériorisé ce qu’ils ont dit. »

Lori Richardson, fondatrice et PDG de Score More Sales, une société de conseil, de formation et de coaching

Il va de soi, et la littérature en traite abondamment, que la collaboration est, d’une façon générale, le mode le plus approprié de gestion des conflits. C’est la seule stratégie de résolution des conflits qui ne fait pas de perdants et qui donne en même temps un bon résultat.

Ce style produit en effet les meilleurs résultats à long terme. Cependant, il est souvent le plus difficile et le plus long à atteindre. La collaboration présente l’inconvénient de consommer du temps et de l’énergie. On n’établit pas une collaboration rapidement. C’est un processus qui nécessite des efforts et qui nécessite parfois de longs délais.

En outre, cette stratégie requiert le plus haut niveau de maturité de la part des acteurs et, si nécessaire, un haut degré de créativité. Car n’oublions pas qu’il y a un conflit au départ.

Quand on a le pouvoir et toutes les ressources nécessaires, il peut être tentant et certainement plus expéditif de se confronter plutôt que d’amorcer une collaboration qui va nous forcer à explorer les besoins de l’autre et à tenir compte.

9.11.2.5. Le compromis

Au centre du graphique de Thomas-Kilmann, nous avons le juste milieu. Nous sommes modérément déterminés à satisfaire nos intérêts et tout aussi modérément investis dans la satisfaction des intérêts des autres.

Dans la plupart des situations, les conflits se résolvent par une certaine forme de compromis où chacun gagne quelque chose mais aussi perd plus ou moins. Ce type repose sur des concessions de part et d’autre des parties en conflit.

Le compromis cherche un accord mutuel pour régler un différend. Les deux parties renoncent à certaines de leurs conditions dans l’intérêt de parvenir à un accord. S’il est vrai, en effet, que nous passons une grande partie de notre vie à gérer les conflits, force est de constater que la négociation demeure le mode privilégié par la plupart des individus pour gérer ces conflits de toute sorte.

« Tout compromis est basé sur le donnant-donnant, mais il ne peut y avoir de donnant-donnant sur les fondamentaux. Tout compromis sur de simples fondamentaux est un abandon. Car tout est donné et non pris. »

Mahatma Ghandi

Vous « coupez la poire en deux ». Vous remplissez certains de vos objectifs propres, de sorte que certains objectifs puissent être obtenus par l’autre partie. Par exemple, l’achat d’une maison ou d’une voiture se négocie à un prix situé quelque part entre l’offre de l’acheteur et les souhaits du vendeur.

Les négociations entre patronats et syndicats obéissent à ce type de comportement. Souvent aussi, même le lieu des vacances est souvent le fruit d’un compromis entre conjoints voire même plus complexe en associant le désir des enfants.

Le compromis peut également s’avérer utile comme méthode temporaire pour éviter les conflits jusqu’à ce que les parties en conflit puissent trouver un terrain d’entente et mettre en œuvre une solution plus pérenne.

Pour continuer à avancer, il convient de faire des compromis lorsqu’il ne serait pas possible de rendre les deux parties complètement heureuses. On négocie avec son employeur pour obtenir une augmentation de salaires. On négocie avec un concessionnaire pour l’achat d’une voiture. On négocie aussi avec ses enfants pour le choix des chaînes télé à visionner sur le téléviseur grand écran et 4K du salon. On négocie en permanence. En permanence on cherche des compromis.

HISTOIRES A MÉDITER

FAIRE PLUS QUE KLAXONNER

On raconte l’histoire d’une jeune femme qui se rendait au travail en voiture à l’heure de pointe du matin. À l’approche d’une intersection, le feu est passé au rouge et elle a dû s’arrêter brusquement. En conséquence, sa voiture a calé. Alors qu’elle tentait désespérément de redémarrer sa voiture, le feu est repassé au vert.

Un camion s’est approché de l’arrière de la voiture, et le conducteur a commencé à klaxonner. Après un changement de feu, puis deux, la jeune femme pompe nerveusement l’essence et met le contact. Le conducteur du camion continue de klaxonner.

Frustrée par son incapacité à faire repartir la voiture et par l’impatience du camionneur derrière elle, la jeune femme sort calmement de sa voiture et se dirige vers le camion. Alors qu’il ouvrait sa fenêtre, elle lui dit poliment : « Si vous voulez bien démarrer ma voiture pour moi, je serai heureuse de continuer à klaxonner votre camion pour vous. »

Il en va de même pour la critique. Nous pouvons faire entendre nos critiques aussi longtemps que nous le voulons, mais cela ne changera pas la situation ou les gens. Au contraire, cela fait surgir ou exploser les émotions négatives.

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