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2.3. L'école néo-classique

L’école néoclassique apparaît vers 1935 en réaction aux approches universitaires et théoriques des concepts d’organisation. Les œuvres de l’un des auteurs les plus prolifiques du 20eme siècle commencent à voir le jour. Peter Drucker, né à Vienne, mais installé aux Etats-Unis. Ce mouvement marque l’avènement des « dirigeants salariés » qui remplacent progressivement les grands « dirigeants propriétaires » de la fin du 19ème siècle.

Son approche est une synthèse entre : L’école classique (pensée empirique) et l’école des relations humaines (pensée pragmatique)

  • Elle est empirique, car elle conceptualise des théories à partir des expériences et des réflexions de « terrain » de ses auteurs qui sont des praticiens (chefs d’entreprises, dirigeants d’entreprise, conseils en management,…)
  • Elle est pragmatique, car elle cherche à dégager des règles simples et efficaces et des principes normatifs applicables à toutes les organisations.

Cette école, développée par des praticiens/consultants dont la base théorique s’inspire de l’école classique est composée en majorité de consultants et dirigeants d’entreprise, étonnés par le gouffre séparant la pratique et la théorie.

Ces auteurs proposent de se replonger dans les théories classiques. Ce sont principalement des auteurs qui partent des théories de Fayol corrigées et étudiées et considèrent que la recherche sur la théorie des organisations devient trop théorique, négligeant le versant pratique.

L’école néoclassique recueille et actualise les idées classiques, auxquelles elle ajoute les résultats de l’école bureaucratique / structuraliste, ceux des relations humaines voire même, ceux de la théorie des systèmes et de la recherche opérationnelle.

Parmi les propositions les plus connues figure la gestion par objectifs (DPO), décrite par P. Drucker en 1954, résultat de son travail chez General Electric. La DPO a subi d’importantes modifications. L’ancien modèle a été progressivement abandonné parce qu’il a donné lieu à un excès de réglementations et de paperasse, parce qu’il était autocratique et, surtout, parce qu’il a fini par détruire le tissu social de l’entreprise dans laquelle il était établi. La DPO moderne a tenté d’éliminer les défauts précédents et, sa mise en œuvre a été très souvent accompagnée de succès.

Les contributions de Koontz à l’analyse du processus administratif; ceux de Chandler à l’interrelation entre la structure organisationnelle et l’environnement; Sloan sur l’organisation divisionnaire; et les travaux pionniers d’Ansoff sur la stratégie sont aujourd’hui des connaissances obligatoires pour quiconque s’intéresse à la science de la gestion.

Les principaux postulats de l’école néo-classique sont les suivants :

  • La maximisation du profit, un des buts de l’entreprise ;
  • La décentralisation des responsabilités et des décisions ;
  • La direction par objectifs (DPO) et la direction participative par objectifs (DPPO) ;
  • Le contrôle par l’analyse des écarts ;
  • La motivation par la compétitivité des individus mis en situation de concurrence;
  • La réduction des coûts et des délais de production par l’introduction du management de la qualité et du concept de la qualité totale.

Tout en intégrant des postulats de l’école psychosociologique sur l’homme au travail, ce courant pense que chaque homme lutte pour sa survie : les meilleurs accèdent aux postes clés, les moins performants sont éliminés.

« L’échec n’est pas le contraire du succès : il fait partie du succès. »

Arianna Huffington, femme d’affaires. Cofondatrice en mai 2005 du site d’actualités politiques The Huffington Post

Nous allons ci-après développer davantage les idées de ceux qui représentent à nos yeux les représentants de ce mouvement néoclassique : P. Drucker, A. Sloan et O. Gelinier

2.3.1. Peter Drucker

Peter F. Drucker est l’un des plus grands penseurs de notre temps. Auteur de 29 livres, écrivain et enseignant, il a été consultant pendant plus de 50 ans. Il reprend la théorie classique de la gestion et la transporte des années 1950 aux années 1990, et annonce la direction future de la gestion.

Il fera du management la fonction sociale la plus importante de l’entreprise.

Selon lui, les 3 tâches du management se présentent comme suit :

  1. La fixation d’objectifs clairs, opérationnels, motivants ;
  2. L’établissement d’un travail productif et d’une satisfaction au travail de toutes les personnes de l’organisation ;
  3. La gestion des impacts et des responsabilités sociales.

Pour remplir ces tâches, P. Drucker tente de dresser 5 principes d’action à l’attention des dirigeants d’entreprise :

  • Fixer les objectifs à atteindre
  • Organiser le travail
  • Motiver et Communiquer
  • Évaluer les performances (standards, normes, ratios…)
  • Former les salariés

P. Drucker dans l’une de ses œuvres les plus récentes estimait que trois auteurs l’ont beaucoup inspiré : Darwin, Taylor et Freud. Le premier, pour proposer que les organismes soient sujets au changement, le second pour jeter les bases d’un travail efficace, le troisième pour l’analyse approfondie des motivations humaines.

«Les seuls facteurs qui font progresser une entreprise sont les hommes, de l’ouvrier au directeur, leur capacité d’innovation et la façon dont ils organisent leurs relations de travail» P. Drucker

Consultant et gourou du management, montrant du respect pour la théorie classique, et sa mise à jour constante, il a conseillé les plus grands chefs d’entreprises nord-américaines.

Drucker recense les attributions d’une équipe de direction :

  • Établir et clarifier la mission spécifique de l’organisation et déterminer des objectifs clairs et réalistes.
  • Mettre en place une organisation de travail efficace et productive entrainant la satisfaction des employés.
  • Tenir compte des répercussions sociales de l’entreprise sur son environnement et des influences de celui-ci sur les orientations et développement de l’organisation.
  • Investir dans la recherche-développement ainsi que le marketing qui sont sources de profit.

En 1945 alors professeur de sciences politiques et de philosophie en Californie, Peter Drucker se fait vite remarquer par le PDG de General Motors. Il travaillera deux années dans cette grande entreprise au cours desquelles il mènera une étude de dix-huit mois. Il procèdera à l’interview de près de 100 personnes du PDG (Sloan) aux ouvriers, il entame une réflexion sur la corporation comme institution centrale d’une société industrielle en émergence.

Il en déduit des propositions qui vont dans le sens de changements profonds en matière de politiques d’emploi et de relations industrielles. Il rédigera un livre intitulé « Concept of the Corporation », un ouvrage qui analyse dans ses profondeurs l’organisation managériale de l’entreprise.

En 1954 il publie un ouvrage de référence (The Practice of Management) La pratique de la direction des entreprises à travers lequel il préconise l’octroi de salaires annuels garantis, la restructuration du travail en des emplois souples, des méthodes modernes de production de masse, la reconnaissance du droit à l’initiative. 

Peter Drucker invite à la conviction que les employés ne doivent pas être considérés comme un coût mais comme une ressource. Ford et general Electric se sont réorganisés en s’inspirant des propositions de ce « gourou » surnommé le « pape du management ».

2.3.2. Alfred Sloan

Lorsqu’on a demandé à Alfred Sloan, sourd et vieillissant: «quel est le titre américain avec la perspective de croissance la plus prometteuse?» Il a rapidement écrit: «General Motors». Sloan a construit la fondation de la société moderne par le biais de la société automobile pionnière. Aujourd’hui, le plan novateur de Sloan est le Saint Graal de la gestion organisationnelle.

Sloan un ingénieur électricien né aux États-Unis, se démarquait par son rejet de la vision de centralisation du pouvoir et de la vision administrative. Il a rejoint General Motors et a adapté l’analyse de Fayol pour mettre en valeur la politique de décentralisation dans les domaines opérationnels.

La majeure partie de son existence et de son expérience est liée à une autorité hiérarchique issue de sa longue carrière chez General Motors Corporation. Ses réalisations au cours de sa carrière ont transcendé la production et la vente d’automobiles populaires. Cela a transformé General Motors en une société qui a changé le monde, appliquant une pensée et des principes démocratiques.

Si quelqu’un veut résumer le concept et la pratique du «manager professionnel», il doit se tourner vers Alfred Sloan. Personne ne le résume mieux que lui. Et c’est là qu’il fait sa différence la plus notable avec son grand concurrent mondial, Henry Ford. Il était clair pour Sloan que les caractéristiques des personnes qui créaient des entreprises étaient très différentes de celles qui les maintenaient en vie et les faisaient croître.

Vous ne pouvez pas en effet passer plusieurs décennies de votre vie dans une multinationale de premier plan sans apprendre davantage sur l’efficacité, le changement et le développement organisationnel, puis les appliquer à la création et au maintien d’autres entreprises.

Alfred P. Sloan, qui a passé 45 ans de sa vie chez General Motors Corporation et est resté PDG pendant 23 ans et il a fait de cette entreprise la première entreprise mondiale durant une dizaine d’année.

PAROLES DE FEMMES

« Vous pouvez rencontrer de nombreuses défaites, mais vous ne devez pas être vaincu. En fait, il peut être nécessaire de rencontrer les défaites, afin que vous puissiez savoir qui vous êtes, de quoi vous pouvez vous relever, comment vous pouvez encore en sortir . »

Maya Angelou

Nous pouvons dire que la façon dont General Motors Corporation a fonctionné et fonctionne encore aujourd’hui a beaucoup à voir avec ce qu’a entrepris Sloan il y a de nombreuses années.

Il a fondé la première université basée sur un programme de formation des cadres, dans lequel il a accordé à ses travailleurs une bourse spéciale pour devenir l’administrateur idéal. C’est aujourd’hui l’une des principales écoles de commerce au monde. Il a développé le concept de l’organisation multidivisionnelle décentralisée.

L’une des principales questions qu’Alfred Sloan se pose en permanence c’est : « quel est le rôle de la direction? ». Sloan souligne que parmi les tâches principales de la direction figure en bonne place la création d’une force de motivation suffisante et des opportunités pour les gestionnaires.

L’un des principes fondamentaux de Sloan et qui semble être un paradoxe, c’est ce qu’il appelle «décentralisation coordonnée» et qui vise à atteindre un équilibre structurel adéquat en conciliant centralisation et décentralisation.

La décentralisation coordonnée

Sloan accorde l’autonomie aux divisions qui deviennent des centres de profit (responsabilité des prix de vente, de la gestion des achats, de la rentabilité des investissements…).

La direction se concentre sur les décisions stratégiques.

Des mécanismes de coordination sont mis en place pour que la décentralisation soit véritablement source d’initiatives et de prise de responsabilités.

La théorie de la décentralisation coordonnée repose sur les grands principes suivants :

  • Autonomie des divisions: elles sont jugées d’après la rentabilité du capital investi.

  • La direction générale ne doit pas s’occuper d’exploitation mais de la stratégie générale.
  • Certaines fonctions clés comme les finances ou la communication doivent être centralisées.
  • La coordination doit se faire par une circulation horizontale des informations.

Ainsi, la décentralisation facilite l’initiative, responsabilise les acteurs de l’entreprise (centre de profit), crée une concurrence entre les divisions et réduit le temps quant à la prise de décision.

 Deux aspects ont toujours été présents dans leur pratique commerciale quotidienne pour les organisations qui souhaitaient se développer dans le temps, c’est-à-dire au-delà de la création de l’entreprise:

  1. l’importance d’autres aspects non charismatiques tels que les facteurs techniques, financiers, personnels, de groupe et organisationnels, et la manière dont ils interagissent tous les uns avec les autres;
  2. l’organisation qui apprend par la pratique quotidienne de la prise de décision et comment elle est à son tour influencée par la forme que prend l’organisation: centralisation ou décentralisation.

Alfred Sloan a pris ses distances avec l’approche du leadership charismatique d’Henry Ford. Sa grande contribution concerne le développement du « manager professionnel » et son importance une fois la société créée.

BLAGUES A PART

« Mon patron est très facile à vivre. Il m’a dit de ne pas le considérer comme le patron, mais plutôt comme un ami qui ne se trompe jamais »

Avec l’arrivée de Sloan – et ses contributions très importantes – General Motors Corporation n’a jamais été la même. Au fil des années, il a su combiner rentabilité avec durabilité et croissance. Les actions de Sloan et leur impact sur General Motors Corporation montrent comment le traitement de facteurs à priori divergents voire contraires peut avoir des effets extraordinaires sur les résultats.

2.3.3. Octave Gélinier

Octave GELINIER est un spécialiste français et ingénieur de formation, il a consacré la majeure partie de sa carrière dans une entreprise de conseil (C.E.G.O.S) dont il devient directeur général en 1970. Pour lui le point fondamental du management est la politique générale de l’entreprise. Il y a selon lui, concordance entre croissance à long terme et profits à long terme. Il est donc nécessaire de fixer des objectifs savamment étudiés.

Durant la décennie 60, il a été considéré comme un membre actif de la pensée néoclassique qui n’est – on l’a maintenant compris – que la combinaison de la gestion scientifique et le courant des relations humaines. Il a écrit de nombreux ouvrages sur la direction de l’entreprise en s’appuyant sur son expérience sur le terrain

La Direction Participative Par Objectifs (DPPO)

Si la Direction par objectifs (DPO) de P. Drucker consiste à attribuer des objectifs aux différents responsables d’unités, Octave GELINIER propose lui à travers sa DPPO  (Direction Participative Par Objectifs), d’associer ces responsables à la définition des objectifs par négociation entre direction et employés.

PAROLES D’EXPERT

« Octave Gélinier propose une implication des salariés à la définition de leurs objectifs. C’est la direction participative par objectifs, processus de concertation établi entre la hiérarchie et les subordonnés dans le but de fixer des objectifs négociés de travail qui seront quantifiés et datés.

Cette méthode suppose que des moyens nécessaires, matériels et humains soient mis en oeuvre par la hiérarchie pour que les objectifs acceptés par les subordonnés soient réalisables. Les hiérarchies et les subordonnés se rencontreront à des échéances régulières pour faire une évaluation des résultats. Ce type de management « délégatif » responsabilise les subordonnés par l’autocontrôle qu’il nécessite. Cette démarche, qui est une application de la « théorie Y » de Douglas Mac Gregor, milite pour la création d’un climat de confiance entre les individus dans l’entreprise »

Roger Aim. « L’essentiel de la Théorie des Organisations ». Ed Gualino

La DPPO est un processus de management reposant sur des objectifs négociés, quantifiés qui permettent :

  • Une délégation de l’autorité ;
  • Une définition des responsabilités ;
  • Une supervision hiérarchique ;
  • Une motivation des individus.

HISTOIRES A MÉDITER

AVOIR UN SEUL OBJECTIF

Romana Banuelos était une personne qui ne pouvait pas être détruite. Alors qu’elle n’avait que seize ans et vivait au Mexique, son mari l’a abandonnée avec ses deux enfants. Elle était pauvre, sans formation et incapable de parler anglais.

Déterminée à améliorer sa vie, elle monte dans un bus avec ses deux enfants et se dirige vers Los Angeles. Elle arrive dans cette ville avec seulement sept dollars en poche. Elle a donné l’adresse d’un parent éloigné au chauffeur de taxi et a dépensé tout ce dont elle disposait jusqu’au son dernier centime pour le trajet en taxi.

Romana a commencé à chercher une vie qui ait un sens. Bien qu’abattue, déçue et rejetée, elle s’accroche à la vision d’une vie meilleure. Sa volonté de travailler et son engagement lui ont permis de trouver un emploi de plongeuse, puis dans une laverie automatique d’ El Paso, au Texas le jour et préparatrice de tacos de minuit à six heures du matin. Elle a pu économiser 500 dollars, qu’elle a investis dans une machine à tacos.

Ambitieuse et motivée, Acosta cherchait constamment des opportunités pour vendre ses tortillas aux entreprises locales. Une chose en entraînant une autre, au fur et à mesure que le volume des ventes augmentait, elle a développé son l’entreprise et l’a nommée Ramona’s Mexican Food Products, Inc et finit par devenir la directrice de la plus grande entreprise de vente en gros de produits alimentaires mexicains au monde.

Ce n’est pas la fin de ce fabuleux compte. Elle a été triée sur le volet par le président des Etats-Unis pour devenir la trente-septième trésorière des Etats-Unis.

Romana Banuelos avait un rêve. Elle croyait que son rêve pouvait devenir réalité, et elle s’est engagée à accomplir plus que ce que quiconque aurait pu attendre. Romana Banuelos est l’exemple de cette profonde intuition offerte par Dwight D. Eisenhower : « Nous ne réussissons que si nous identifions dans la vie, ou dans la guerre, ou dans n’importe quoi d’autre, un seul objectif primordial, et si nous faisons en sorte que toutes les autres considérations se plient à cet unique objectif ».

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