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Que fait donc réellement un manager ?

Contrôler, organiser, coordonner, planifier, inspirer, déléguer, diriger, développer, soutenir… Énumérez simplement tout ce que vous attendez d’un bon patron. Le fait est que même de nombreux managers ne sont pas tout à fait clairs sur leurs tâches réelles.

Toute personne à qui sont confiées des tâches de gestion est appelée gestionnaire ou manager. Les managers ont de nombreuses responsabilités qu’ils ne peuvent pas facilement déléguer à d’autres, Planifier, organiser, coordonner et contrôler sont souvent présentés comme les tâches d’un manager. En fait, les managers passent la plupart de leur temps sur des choses complètement différentes.

Les rôles de gestionnaire varient d’une entreprise à l’autre, d’un rôle à l’autre et d’une personne à l’autre.

Ce qui vous attend dans cet article :

1. Les éléments de base du management moderne

La théorie du management a commencé très tôt à définir et à préciser quelles fonctions appartiennent en détail au cercle des tâches de gestion effectuées par un manager. Les catalogues de fonctions qui ont été développés par la suite couvrent un large spectre. Les travaux pionniers d’Henri Fayol ont eu une influence particulière.

1.1. Le POCCC de Fayol

Au début du 20e siècle, l’ingénieur minier français Henri Fayol, un des fondateurs de la théorie de l’organisation des entreprises, a constaté que  des analogies de gestion existent dans toutes les organisations.

Fayol estimait que les mêmes principes de gestion pouvaient être appliqués à toutes les organisations, indépendamment de leur taille ou de leur statut (entreprises de production, entreprises commerciales, institutions gouvernementales, politiques ou religieuses.) Ses 5 éléments clés de la gestion industrielle sont des pierres angulaires permanentes sur lesquelles tous les gourous ultérieurs se sont plus ou moins appuyés.

Henri Fayol avait des années d’avance sur son temps : il associait la stratégie et la théorie organisationnelle et soulignait la nécessité de développer le management et le leadership. Igor Ansoff a expliqué dans Corporate Strategy (1965) que Fayol avait « intuitivement et rationnellement prévu la plupart des analyses récentes de la gestion d’entreprise moderne »

GUILLEMTS-VERTS

« L’administration, qui demande l’application de vastes connaissances et de nombreuses qualités personnelles, est avant tout l’art de manier les hommes, et dans cet art, comme dans beaucoup d’autres, c’est la pratique qui rend parfait. »

Henry Fayol

De son coté, Peter Drucker a en 1973, dans son compendium Management « Tasks, Responsibilities and Practice » relevé, l’impossibilité d’appliquer l’approche fonctionnelle de Fayol à des organisations plus grandes et plus complexes que celles qu’il avait lui-même connues et dirigées.

Fayol a particulièrement insisté sur le rôle du manager. Il a postulé des principes généraux de gestion dans une perspective de gouvernement d’entreprise, tels que la division du travail, l’ordre et la discipline, la subordination des intérêts particuliers à l’intérêt de l’ensemble, ainsi qu’une rémunération appropriée du personnel, l’égalité, l’initiative et l’esprit de corps. Il prôna également une hiérarchie claire et une centralisation modérée.

Fayol avait déjà plus de 70 ans lorsque ses idées ont été publiées, et son célèbre ouvrage « Administration Industrielle et Générale » n’a été publié en anglais qu’en 1949 sous le titre « General and Industrial Management ».

S’appuyant sur sa propre expérience à la tête de la société minière et sidérurgique, Commentry-Fourchambault et Decazeville, il est considéré comme l’homme qui, le premier, a posé la question « Qu’est-ce que le management ? » et qui a analysé en quoi consistait l’activité du manager.

Il a été aussi l’un des premiers à formuler des « éléments d’administration », qui constituaient en même temps un résumé de son expérience personnelle et qui étaient identifiées par l’acronyme POCCC (Prévoir, Organiser, Commander, Coordonner, Contrôler.

Il a ainsi distingué les fonctions suivantes :

  • Prévision et planification (prévoir),
  • Organisation (organiser),
  • Instruction (commander),
  • Coordination (coordonner),
  • Contrôle (contrôler).
GUILLEMTS-VERTS

« En France, un ministre a vingt adjoints, là où la théorie administrative dit qu’un directeur à la tête d’une grande entreprise ne doit pas en avoir plus de cinq ou six. »

Henry Fayol

Ces fonctions sont restées la norme généralement acceptée jusqu’aux études éclairantes d’Henry Mintzberg dans les années 1960.

Les 10 rôles de gestion selon Mintzberg

Mintzberg a distingué 10 rôles de gestion, et les a subdivisés en 3 domaines. Le premier domaine concerne le niveau interpersonnel, le deuxième concerne le niveau informationnel et le troisième concerne le niveau décisionnel

  • Niveau interpersonnel
    Cadre symbole
    Leader
    Agent de liaison
  • Niveau informationnel
    Observateur
    Diffuseur d’information
    Porte-parole

  • Niveau décisionnel
    Entrepreneur
    Régulateur
    Répartiteur de ressources
    Négociateur

Vous pouvez utilement consulter notre section de cours :
« Les rôles du manager« 

Certains auteurs contemporains associent « commander » et « coordonner » en une seule fonction : « décider ». On pourrait toutefois objecter qu’il existe une différence de forme et de contenu entre une fonction/animation de commande et celle de coordination.

Fayol définissait le premier élément comme « l’exploration de l’avenir et la conception du plan d’action correspondant » ; le deuxième comme « la construction de la structure matérielle et humaine de l’entreprise » ; le troisième comme « le maintien des activités entre les collaborateurs » ; le quatrième comme « la liaison, l’unification et l’harmonisation de toutes les activités et de tous les efforts » et le cinquième comme « le souci de faire en sorte que tout se déroule conformément aux règles et aux instructions établies ».

1.2. Du POCCC au POSDCORB

De son coté, Luther Halsey Gulick, expert américain en administration et management publics a apporté une contribution théorique sur les tâches administratives et sa définition des fonctions exécutives. Selon Gulik, la conception d’une organisation est très importante. Une structure mal organisée entraîne des dysfonctionnements dans les services et, par extension, dans l’organisation.

Gulick a repris les principes fondamentaux d’administration de Fayol sous forme d’une série de 7 principes, connues sous l’acronyme POSDCoRB (ou PODSCoRB). Les lettres signifient Planning, Organizing, Staffing, Directing, Coordinating, Reporting, Budgeting soit planification, organisation, dotation en personnel, Direction, coordination, rapport et budgétisation.

Le document de Gulick, intitulé « Notes on the Theory of Organization » (Notes sur la théorie de l’organisation) pose la question suivante : « Quel est le travail du dirigeant ? Que fait-il ? Il résume la réponse par l’acronyme POSDCORB.

  1. Planification.

Il s’agit d’une esquisse générale du travail. La planification est la première et a plus importante étape de POSDCORB car elle définit la structure globale du processus avec des activités et des échéanciers. C’est la tâche des managers non seulement de décider quoi faire, mais aussi de planifier cela dans le temps. La planification est liée à la prévoyance. Cela comprend la planification à court terme (hebdomadaire, mensuelle et trimestrielle), la planification à moyen terme (annuelle) et la planification à long terme (prévoyant avec un échéancier de 3 ans).

Définissez votre objectif et déterminez ce que vous et votre équipe devez faire pour l’atteindre.

  1. Organisation

 Organiser consiste à classer, définir et synchroniser formellement es différents sous-processus ou subdivisions du travail à accomplir. Les gestionnaires ont non seulement la tâche d’assigner des activités, mais ont également la tâche d’attribuer ces tâches à leurs départements et employés respectifs.

Organisez vos équipes de manière à ce qu’elles puissent travailler dans la meilleure configuration possible. Examinez la structure et la manière dont ses différentes subdivisions sont organisées et coordonnées. Pour démarrer le plus efficacement possible, il est important que la division du travail des employés corresponde au mieux à l’objectif final et au résultat final.

GUILLEMTS-VERTS

Les personnes qui réussissent forment des habitudes qui alimentent leur succès, au lieu d’habitudes qui alimentent leur échec.

Jeff Olson

  1. Dotation en personnel

Cette section concerne la politique du personnel et toutes les activités connexes au sein d’une organisation. Un personnel compétent est la clé d’une organisation productive. Il est crucial pour qu’une organisation fonctionne de manière optimale.

Il s’agit de recruter et de sélectionner les bons candidats pour le poste et de faciliter leur orientation et leur formation tout en maintenant un environnement de travail favorable. L’ensemble de la procédure de recrutement, de sélection et de formation relève de cette politique du personnel et garantit que le bon type d’employé est au bon endroit. C’est la tâche du gestionnaire d’identifier d’abord l’expertise, les compétences et les expériences requises pour certains postes.

Il s’agira aussi, et, c’est important, de nommer les bonnes personnes aux bons postes, afin qu’elles puissent travailler efficacement. Procédez à un recrutement viable et fiable, formez et développez votre personnel, et faites correspondre leurs compétences et leur expertise aux tâches qu’ils ont à accomplir.

  1. Direction

La direction, bien sûr, est entre les mains du manager ; il / elle est la personne qui a la responsabilité finale. En pratique, cela signifie que le gestionnaire garde le contrôle sur toutes les fonctions Il s’agit d’une étape importante du cycle POSDCORB car elle fait bouger les choses en donnant des objectifs clairs aux équipes et aux individus. Il s’agit de la tâche permanente qui consiste à prendre des décisions et à les intégrer dans les recommandations ou instructions que vous donnez à votre équipe.

En outre, le manager surveille mais aussi motive ses collaborateurs. Il leur indique la meilleure façon de faire leur travail, les encourage et les pousse à relever les défis qui se présentent à eux.

  1. Coordination

Il s’agit essentiellement d’orchestrer et d’articuler les différentes composantes de l’organisation. Il s’agit de la coordination des collaborateurs et des employés. Gulick explique que les managers disposent d’un temps et d’une énergie limités et qu’ils doivent en tenir compte lorsqu’ils décident du nombre de personnes qu’ils peuvent superviser avec succès (« étendue du contrôle »).

Avec ce concept, il incombe au gestionnaire de connecter différentes sections et de parvenir à une coopération. Un bon manager a une vue « aérienne, qui lui donne une vue d’ensemble de ce qui se passe et de ce qu’il reste à faire. Il insiste également sur le fait que chaque membre de l’équipe ne doit recevoir de directives que d’un seul responsable afin d’éviter toute confusion (« unité de commandement »).

Dans cette perspective, le manager est capable de coordonner les tâches et de gérer ses employés. C’est sa tâche de synchroniser les différents départements et de les réunir avec le bon objectif final à l’esprit.

  1. Rapports.

Sans rapport, il n’y a aucune preuve. Un rapport clair maintient la communication ouverte dans toute l’organisation. Les managers sont le lien entre l’équipe de direction et leurs propres employés. Les rapports impliquent aussi de tenir régulièrement le supérieur informé des progrès ou des activités liées au travail.

L’information doit aussi être « descendante » : Tenez les membres de l’organisation au courant de ce qui se passe. La diffusion de l’information peut se faire par le biais d’enregistrements ou d’inspections. Des informations essentielles, telles que les problèmes avec les employés, les nouveaux processus, les entretiens de performance et les chiffres de vente, sont également rendues transparentes grâce aux rapports.

Fournissez à vos collaborateurs des nouvelles, des résultats et des informations générales afin de stimuler leur moral, leur productivité et leur engagement. Les rapports donnent un aperçu des progrès et les accords peuvent également être enregistrés de cette manière. Les parties impliquées peuvent, au besoin, également trouver rapidement des rapports archivés.

  1. Budgétisation

 La finance est la pierre angulaire de toute organisation. Le manager est responsable de la gestion, des dépenses et du contrôle du budget de sa structure.

La budgétisation implique toutes les activités relevant de l’audit, de la comptabilité, de la planification et des contrôles fiscaux. L’établissement d’un budget permet de contrôler les recettes et les dépenses de l’organisation et peut déterminer la réussite d’un projet.

2. Les imperfections du processus managérial linéaire

La séquence linéaire des fonctions de gestion qui vient d’être présentée ci-dessus est souvent critiquée aujourd’hui et considérée comme étant une description un peu trop idéalisée du processus de gestion.

Tout d’abord, parce que dans la pratique, les interdépendances entre les fonctions existant dans une organisation sont si prononcées qu’elles défient un ordre aussi strict. Les interdépendances se manifestent en même temps et à la fois en termes factuels et temporels. Ainsi, les tâches se chevauchent trop et ne peuvent être isolées et étalées dans le temps dans le processus de travail pratique au point qu’un traitement séquentiel au sens du processus développé serait possible.

Mieux encore, l’influence mutuelle va à l’encontre d’un processus linéaire. Les systèmes et les actions de contrôle, par exemple, ne concernent pas seulement la recherche, l’obtention et l’analyse d’informations sur l’exécution du plan, mais ils ont également un effet sur les attitudes et le comportement des employés envers le travail qu’ils accomplissent. Trop de contrôle décourage, crée de la méfiance, encourage l’évasion, etc.

Des rétroactions similaires existent également dans les autres fonctions. Notons qu’un système d’évaluation peut nuire à la motivation, et une planification trop rigoriste et détaillée laisse trop peu de place au personnel hautement qualifié et aux idées novatrices.

De même, une fois que la structure organisationnelle a été choisie, elle agit comme un déterminant dans les phases ultérieures sur la préparation du plan (elle a pour effet de réguler le flux d’information, d’orienter la spécialisation, de contrôler le comportement de recherche par la mise en place de centres de profit, etc.), de sorte que l’organisation peut ainsi précéder la planification dans une inversion de l’ordre développé dans le POCCC ou le POSDCORB.

A partir de ces quelques exemples, il s’ensuit que plusieurs fonctions et activités doivent généralement être considérées en même temps. Par exemple, la décision prise pour la mise en place d’un système de motivation est en même temps une décision pour un système de contrôle ou à tout le moins une décision contre un certain type de système de contrôle.

Ces écarts entre la conception linéaire du processus de gestion classique et les processus de gestion réels a donné lieu à une étude empirique plus fouillée de la manière dont la batterie des activités d’un gestionnaire est représentée dans la réalité

 « Demandez à un manager ce qu’il fait, et il vous répondra très probablement qu’il planifie, organise, coordonne et contrôle. Ensuite, observez ce qu’il fait réellement. Ne soyez pas surpris si vous ne pouvez pas relier ce que vous voyez à l’un de ces quatre mots. » (Mintzberg)

Par la déclaration ci-dessus, à dessein provocatrice, le chercheur canadien en management Henry Mintzberg résume le résultat de son étude sur la nature de la tâche de management. Cette étude fait partie de la série des analyses empiriques menées sur le travail de gestion et, dans lesquelles s’est concrétisé le reproche d’un manque de proximité avec la réalité du concept classique linéaire des fonctions de gestion.

« Que font vraiment les managers à longueur de journée ? Marchent-ils vraiment sans cesse devant leurs employés et, comme des chefs d’orchestre, conduisent-ils les groupes individuels et les parties de leur organisation vers leurs objectifs – peut-être même avec l’agilité et la précision d’un Karajan ? Les légendes colorées ne manquent pas sur les actions et les costumes des managers. Mais cela n’a généralement pas grand-chose à voir avec les faits nus de leur travail. Parce que, comme le révèlent des études sur des managers de tous calibres et rangs – du président des Etats-Unis aux dirigeants d’entreprise et contremaîtres au chef d’un gang de rue – les managers ne sont en aucun cas ces concepteurs rationnels qui agissent et gouvernent sur la base d’une information. Ce qui est apparu à la place, c’est que les gestionnaires dans des domaines très complexes, agissent également dans des réseaux de relations émotionnellement chargés et doivent remplir un grand nombre de rôles parfois conflictuels – en relation avec les personnes, les informations et les décisions, selon la situation. Plus que jamais, le public et les managers doivent apprendre à reconnaître eux-mêmes les réalités de ce métier, le plus impartialement possible et le plus dénué d’illusions possible. Parce que seule une (auto-)compréhension sans fard aide les managers à maîtriser leur tâche difficile. » 

Henry Mintzberg

3. Les activités réelles d’un manager

Des nombreuses enquêtes de type « Shadowing » un schéma de comportement quotidien du manager s’est dégagé. Précisions que ces constats ont été confirmés par de nombreuses autres études ultérieures.

3.1. Ce que nous apprend le shadowing

Dans des études sur l’activité professionnelle, l’objectif a été d’enregistrer de manière impartiale et minutieuse les modèles de progression que les activités des cadres suivent réellement.

A cet effet, diverses méthodes ont été mises en œuvre. D’abord, les études de journal dans lesquelles les gestionnaires sont invités à enregistrer chronologiquement leurs activités individuelles sur une période de temps donnée. Encore plus importantes, cependant, étaient les études qui fournissaient aux gestionnaires un observateur permanent (« shadowing ») avec la stipulation que toutes les activités d’une journée étaient méticuleusement enregistrées.

Bon à savoir

Qu’est-ce que le « shadowing » ?

Le shadowing ou « observation au travail » est une méthode ethnographique qui vise à s’immerger totalement dans le parcours réel d’une personne cible en le suivant comme son ombre. Cette observation terrain (ou in situ) fait son retour sous le nouveau nom de shadowing. Dans ce type d’observation, un enquêteur ou un observateur passera un certain temps à observer minutieusement le travail quotidien de la personne sur laquelle porte l’enquête.

Au cours de son observation, l’observateur note toutes les tâches accomplies par la cible durant sa journée ou son parcours. Durant cette approche pratique de l’observation au poste de travail, l’enquêteur pourra disposer d’une représentation typique de ce que la personne cible fait réellement au quotidien et qui pourrait impliquer un certain nombre d’activités. Ce type d’observation est indiqué lorsque l’enquêteur cherche à mieux comprendre en quoi consiste réellement le travail de la cible enquêtée, comprendre ses besoins et les contraintes qu’elle rencontre.

Dans le cas qui nous intéresse ici, les informations collectées par l’observation type « Shadowing » s’avèrent être déterminantes pour justement s’appuyer sur des informations solides liées aux habitudes, activités, reflexes et contextes des managers et, gommer ainsi les présupposés qui pourraient surgir. 

Parmi les enseignements du shadowing on peut citer :

1. Cycles parallèles de résolution de problèmes.

L’œuvre n’a pas de début ni de fin clairs. Elle se caractérise plutôt par la résolution simultanée de différents problèmes. Les problèmes sont négociés dans différentes arènes avec des participants spécifiques. Les managers passent d’une arène de résolution de problèmes à une autre, souvent sans faire avancer le problème vers sa solution. Il y a toujours plusieurs cycles ouverts sur lesquels il faut travailler. De manière inattendue, de nouvelles arènes apparaissent encore et encore.

2. La journée de travail est fragmentée.

Le travail dans des domaines parallèles se reflète également dans le rythme de travail observé. Le travail ne se déroule pas selon une séquence ordonnée et progressive, mais se caractérise par une multitude d’activités individuelles, de conversations ad hoc, de visites non planifiées et un va-et-vient constant entre des sujets et des domaines allant de problèmes quotidiens insignifiants à des investissements de 10 millions d’euros.

Mintzberg, dans son étude au cours de laquelle cinq cadres supérieurs ont été observés directement pendant une semaine, a constaté que la moitié des activités d’une journée duraient moins de 9 minutes et que seulement 10% des séquences de travail duraient plus d’une heure (principalement des réunions).

Une étude plus récente menée auprès de cadres suédois, arrive à des résultats similaires : près de 50 % des unités de travail observées duraient moins de 9 minutes.

3. La communication orale.

 La majorité du travail de leadership se fait sous forme de conversations. Dans toutes les études, il a été unanimement démontré que l’essentiel du travail se fait au contact et par le contact des personnes. Dans les nombreuses études, il n’y a guère de manager qui consacre moins de 70% de son temps à la communication orale (appels téléphoniques, réunions, vidéoconférences, discussions avec le personnel, etc.). Dans de nombreux cas, le pourcentage est nettement supérieur (plus de 90%).

4. Demander et écouter.

 Les contacts ne consistent que dans une faible mesure en des instructions. Poser des questions, écouter et donner des informations prennent des proportions plus importantes. Ainsi, la réception d’informations devient rapidement une tâche essentielle. Les interlocuteurs sont très différents : collègues de l’autre sexe, supérieurs hiérarchiques, clients, médias, associations, fournisseurs, etc. 

Les observations ont aussi révélé que les interactions avec les employés directement subordonnés représentent rarement plus de la moitié de tous les contacts. De même qu’il est apparu que les bonnes habitudes n’étaient pas sporadiques mais consistaient en des reflexes continuels et répétés.

GUILLEMTS-VERTS

« Ce n’est pas ce que vous faites de temps en temps, c’est ce que vous faites jour après jour qui fait la différence. »

Jenny Craig

5. Gestion de l’imprévu.

 Les difficultés et contraintes soudaines ainsi que les événements imprévus font partie du quotidien des managers. L’attendu est souvent confronté à l’inattendu. Les événements inattendus ne sont pas toujours immédiatement identifiables comme un problème clair ou évident. Souvent, il faut d’abord décider s’il y a un problème.

Les informations fiables font parfois défaut. Néanmoins, il est nécessaire de réagir rapidement à la nouvelle donne afin d’éviter des dommages à l’organisation. En même temps, ces observations de l’activité de management montrent que les managers loin de se contenter d’initier et de donner des impulsions, ils doivent aussi, dans une large mesure, réagir aux influences extérieures et s’adapter sans cesse à de nouvelles situations.

3.2. Les apports de Rosemary Stewart

Les-tâches-du-manager

Rosemary Stewart, chercheuse et écrivaine britannique sur la gestion d’entreprise, à travers ses recherches « exigences, contraintes, choix », offrait aux managers un moyen de mieux comprendre leur travail, afin qu’ils puissent le façonner de manière ciblée, plutôt que d’être porté par l’habitude ou l’élan.

Dans ses recherches, elle s’est posée un certain nombre de questions :

  • Quels aspects du travail le gestionnaire choisit-il de mettre l’accent en termes de réflexion, de temps, d’efforts et d’engagement de ressources ;
  • Comment et quelles tâches sont déléguées ;
  • Comment le gestionnaire gère les limites de son travail.

De quelle liberté disposez-vous pour vous acquitter de vos taches de manager ? Quels facteurs peuvent limiter votre efficacité ? Plus important encore, que pouvez-vous faire face à de telles limitations ? En 1982, Rosemary Stewart a fait part de sa conceptualisation de la tâche managériale. Selon cette conception, le champ d’activité d’un manager est déterminé par 3 composantes :

  • Les exigences de l’emploi. Elles représentent ce que le titulaire de l’emploi doit faire. Il s’agit de toutes les activités qui font partie des fonctions naturelles d’un titulaire de poste.

  • Les contraintes de l’emploi. Elles limitent ce que le titulaire du poste peut faire. Ce sont les limitations que le manager rencontre dans ses activités. Elles peuvent émaner de l’intérieur ou de l’extérieur (par exemple, les états financiers annuels, les statuts, les technologies utilisées). Elles ne peuvent pas être influencées par le manager.

  • Les choix. Ils indiquent le degré de liberté dont dispose le titulaire du poste pour effectuer le travail de la manière qu’il ou elle choisit. Il s’agit de l’espace d’activité qui peut être conçu librement. Ici, le manager peut imprimer sa marque personnelle, son empreinte sur son travail et son environnement (par exemple, style de leadership, valeurs, style de travail etc.).

L’objectif de Rosemary Stewart était de montrer comment le fait de bien gérer les exigences et les contraintes, et d’exercer des choix, peut améliorer l’efficacité des managers.

Si toutes les activités de management sont caractérisées par ces trois composantes, leur intensité varie d’un niveau à l’autre (management inférieur, intermédiaire et supérieur) et d’une organisation à l’autre.

On estime souvent qu’une tâche de top management se caractérise par un nombre particulièrement élevé de « choix » et un nombre particulièrement faible d’ « exigences« .

Or, ce n’est pas toujours le cas. Une analyse des activités d’un président d’un pays montre que souvent les « exigences » pouvaient avoir une position dominante. En effet, et à bien regarder on remarque que la façon dont un président utilise son temps et alloue son attention est déterminée par les choses qu’il doit faire chaque jour : le discours qu’il a promis de prononcer, la réunion à une date fixe qu’il ne peut plus reporter notamment avec des homologues étrangers, le document qu’il est le seul à pouvoir signer, le repos que son médecin a prescrit.

Les priorités ne découlent pas de la pertinence d’un sujet, mais de la nécessité de devoir faire quelque chose.

3.3. La contribution de John P. Kotter

General-manager

John P. Kotter, expert de renommée mondiale en matière de leadership, est l’auteur de nombreux livres, dont Leading Change, Our Iceberg is Melting , The Heart of Change , et bien d’autres, dément la notion populaire selon laquelle un manager serait un généraliste qui possèderait des aptitudes lui permettant de gérer et diriger n’importe quelle entreprise.

John P. Kotter, dans son célèbre article sur Harvard Business Review « Ce que font vraiment les directeurs généraux efficaces » tout en nous donnant l’exemple d’un journée type d’une directeur général, nous rappelle leurs défis et dilemmes fondamentaux ;

  • Savoir quoi faire en dépit d’une grande incertitude et une grande quantité d’informations aussi pertinentes les unes que les autres ;
  • Faire évoluer les choses grâce à un groupe important et diversifié de personnes même si l’on ne détient que peu de contrôle direct sur la plupart d’entre elles.

Dans son ouvrage « The General Managers », on relève que son étude se distingue également de la plupart des recherches traditionnelles sur les managers en raison de l’accent qu’elle met sur le contexte dans lequel les managers opèrent. La plupart des études ont utilisé des questionnaires comme base d’échantillonnage à partir de plusieurs contextes afin de réduire la variation associée à un contexte unique.

Au lieu de cela, Kotter étudie directement cette variation en s’interrogeant :

  • A quoi ressemblent réellement les postes de direction générale ?
  • Quelles exigences posent-ils à la direction générale en place ?
  • Dans quelle mesure et de quelle manière ces exigences varient-elles en fonction des différents types de postes de DG et des différents contextes commerciaux et d’entreprise ?
  • Qu’est-ce qui crée cette variation ?
  • Quels sont les types de personnes qui tendent à être efficaces dans les emplois de Directeur général ?
  • Comment ces personnes peuvent-elles être identifiées ?
  • Pourquoi ces personnes sont-elles efficaces dans les emplois de Directeurs généraux ?
  • Dans quelle mesure et de quelle manière les caractéristiques personnelles des directeurs généraux efficaces varient-elles en fonction des situations ?
  • Quelles sont les causes de cette variation ?

Kotter a développé un schéma d’interprétation pour capturer les relations de signification derrière le comportement de travail visible dans le contexte de son étude d’observation des directeurs généraux.

GUILLEMTS-VERTS

« À tout moment, le monde compte un nombre très limité de Steve Jobs, de Winston Churchill ou de Thomas Watson parmi les premiers. Ce sont des gens merveilleux et nous pouvons apprendre beaucoup d’eux, mais prier pour que quelques-uns d’entre eux résolvent les problèmes du monde n’est pas une bonne idée. »

John P. Kotter 

Il met en exergue l’importance chez les directeurs généraux, de la mise en place et l’entretien d’un réseau (comptant parfois plus de 100 contacts formels et informels à l’intérieur et à l’extérieur de l’entreprise. les managers passeraient 85% de leur temps à construire et entretenir des relations. C’est vraiment beaucoup de temps, mais qu’est-ce que cela signifie exactement?

De nombreuses études ont, à ce titre montré que l’une des principales caractéristiques des managers qui réussissent est de se constituer un réseau personnel. Un tel réseau résulte de relations formelles (certains employés subordonnés, collègues directs, etc.), de relations informelles (amitiés issues de travaux antérieurs, connaissances issues de séminaires communs, etc.) ainsi que de relations externes (à d’autres entreprises, universités, clubs, associations, etc.)

Certaines études montrent que les managers consacrent 2 à 3 heures par jour au traitement des e-mails, 2 heures à la réflexion et l’analyse et environ 2,5 heures au travail administratif. Cela équivaut à 7,5 heures par jour. Où trouvent-ils alors le temps d’entretenir leurs réseaux relationnels ?

Les réseaux personnels sont propices à l’accomplissement des tâches à bien des égards et notamment pour clarifier des informations difficiles à analyser, pour obtenir des connaissances précieuses mais difficiles d’accès, pour mettre en œuvre des programmes peu soutenus voire controversés, pour lancer de nouveaux domaines de discussion, etc.

Conclusion

Dans la recherche de ce que font les managers quotidiennement, des cadres de toutes sortes ont servi de sujets d’étude : Directeurs généraux, gestionnaires divers, contremaîtres, directeurs d’usine, responsables des ressources humaines, directeurs des ventes, administrateurs d’hôpitaux, cadres d’entreprise, chefs d’État etc.

Vous arrivez au bureau le matin, demandez un café à votre secrétaire, ouvrez l’ordinateur portable et répondez d’abord aux e-mails. Le flot d’appels, de demandes de renseignements et de messages ne s’arrête pas. Le déjeuner est englouti « sur le pouce » au bureau pour éviter de « perdre » du temps. Le soir, le dirigeant est la dernière personne à éteindre la lumière, à fermer la porte et à respirer profondément. Une autre journée terminée.

Le manager serait-il ce gestionnaire très performant qui semble toujours connaître la bonne stratégie, faire le bon choix et motiver efficacement les employés, attirer les partenaires et les clients ? Vous pourriez être surpris d’apprendre que la plupart n’ont pas de « pouvoirs de super-manager » spéciaux. Bien sûr, certains ont un talent inné pour la communication ou le leadership. Mais le véritable différenciateur est souvent l’expérience.

L’expérience qui fait comprendre que les employés veulent un gestionnaire authentique qui parle un langage simple et laisse chacun contribuer à ce qui se passe dans l’entreprise. Ils veulent des commentaires sur ce qu’ils font, ils veulent des objectifs, mais ils veulent aussi la liberté. Les employés – nous tous – voulons être écoutés et faire preuve d’empathie. Nous voulons être mis au défi, mais nous voulons aussi être équitablement récompensés. Nous avons des attentes.

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