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Structures organisationnelles. Le best way n’existe pas

L’organisation est tout : Avec cette devise, non seulement les individus vont loin, mais surtout les entreprises. Choisir la meilleure structure organisationnelle pour votre entreprise, votre service ou votre équipe est fondamental car la structure organisationnelle constitue la pierre angulaire de toute entreprise et peut faire la différence entre le succès et l’échec.

Ce qui vous attend dans cet article :

1. Introduction

La structure organisationnelle définit la manière dont les processus de travail et les employés sont organisés au sein d’une entreprise. C’est un système qui détermine comment l’entreprise travaille pour atteindre ses objectifs. Toutes les entreprises ne fonctionnent pas de manière optimale avec une structure organisationnelle hiérarchique. Il existe de nombreux types d’organigrammes car il existe de nombreux types de structures organisationnelles.

Si vous ne choisissez pas soigneusement la structure de votre entreprise, c’est elle qui vous choisira. Faire le bon choix de structure n’est pas une sinécure. Ensuite peut-on envisager une structure idéale : un best way ?

GUILLEMTS-VERTS

« Chaque entreprise a deux structures organisationnelles : la structure formelle est inscrite sur les organigrammes ; l’autre est la relation quotidienne des hommes et des femmes de l’organisation. »

Harold Geneen

Les concepts fondamentaux présentés dans les sections 7.5. Typologies des structures classiques des organisations et 7.6. Les nouvelles structures d’organisation pourraient laisser croire que l’analyse des organisations est avant tout un exercice théorique, qui revient à optimiser l’équilibre dynamique entre les choix de spécialisation et de coordination, indépendamment du contexte.

Dès la fin des années 50, ce point de vue abstrait s’est heurté à une  série  de recherches pratiques qui ont souligné l’impact déterminant de la situation réelle et des caractéristiques   intrinsèques   de   l’organisation.   Puisqu’il   prône   que   les    choix    structurels sont  contingents  au  contexte  dans  lequel  se  trouve  l’organisation,  ce  mouvement   a   été   appelé l’école de la contingence structurelle.

Cette  série  de  travaux,  qui  s’est  essentiellement  développée  dans  les  années  60  et  70,   se  caractérise   avant  tout  par   sa  rupture  avec  les  courants  de  pensée  normatifs  classiques   qui prônent qu’il existerait  une  forme  structurelle  meilleure  dans  tous  les  cas,  le  fameux  one  best  way  («  meilleure  manière  de  faire  »)  recherché  par  les   tayloriens. En opposition avec ce  point  de  vue,  l’école  de  la  contingence  structurelle  se caractérise par deux postulats fondamentaux :

1. Il n’y a pas de structure  d’organisation  idéale,  mais  autant  de  « best  ways »  qu’il  existe  de contextes différents.  La  recherche  en  organisation  doit  donc  passer  de  la  définition  d’une structure idéale à celle d’une  série  de  solutions  adaptées  à  des  situations  spécifiques.

2. La performance d’une organisation  dépend  de  la  capacité  d’adaptation  de  sa  structure  aux évolutions des contraintes contextuelles, qui  sont  tant  internes  qu’externes  à  l’organisation elle-même. Ces déterminants, contextes ou facteurs de contingence de l’organisation sont multiples. Il s’agit soit de la taille ou de \‘âge de l’organisation de la  technologie ou de ses systèmes techniques, de la stratégie adoptée, des caractéristiques de l’environnement dans lequel elle évolue, ou encore de la culture nationale dans laquelle elle s’inscrit.

Les auteurs de ce courant de pensée ont diversement mis l’accent sur l’un ou l’autre de ces facteurs de contingence. Il convient cependant de souligner que les travaux les plus récents s’inscrivent plutôt dans une démarche de synthèse qui englobe tous ces facteurs.

GUILLEMTS-VERTS

« Les structures organisationnelles d’aujourd’hui exigent trop de quelques-uns, et pas grand-chose de tous les autres. »

Gary Hamel

L’ensemble  des  contributions  de  l’école  de  la  contingence  structurelle  peut  être  classé  selon  qu’ils  privilégient  les  facteurs  de  contingence  internes   à   l’organisation   (technologie,   taille, stratégie) ou les facteurs de contingence externes (environnement, culture  nationale) c’est-à-dire ceux qui relèvent de l’environnement. Nous distinguerons successivement les uns puis les autres.

2. Les facteurs internes

Les principaux facteurs internes que les théoriciens de la contingence ont mis en avant comme déterminants des arrangements et choix organisationnels sont la technologie, la taille et la stratégie.

2.1. La technologie

Selon certains auteurs, certaines solutions organisationnelles sont plus  pertinentes  que d’autres en fonction du contexte technologique. La technologie est pourtant une variable dont la définition est floue tant s’agissant de son contenu que de sa mesure, ce qui  est d’ailleurs gênant car elle est présentée comme l’une des variables les plus importantes pour décrire une organisation.

Trois essais de typologies classiques permettent d’appréhender cette variable. Ce sont  les travaux de J. Woodward, de C. Perrow et de J.D. Thompson.

2.1.1. Les travaux de Woodward

Joan Woodward a mené une enquête sur 100 entreprises anglaises pour tenter de caractériser les relations entre la technologie et les systèmes  d’organisation.  Pour  Woodward, la structure d’une entreprise est étroitement liée à son système technique de production.

GUILLEMTS-VERTS

« À mesure que la technologie progresse, tout le concept d’autorité dans l’industrie devra peut-être changer. Dans les entreprises de transformation, les relations entre supérieur et subalterne ressemblaient beaucoup plus à celles entre un agent de voyages et ses clients qu’à celles entre un contremaître et les opérateurs de la production de masse. Le travail du contremaître de procédé était d’arranger les choses dans les limites, fixées par l’usine, que lui et les opérateurs acceptaient. »

Joan Woodward

Ses travaux l’ont d’abord conduite à l’identification de trois formes de technologie de production :

1. La production à l’unité ou en petites séries. Elle se caractérise par la situation de produit conçu et fabriqué selon les spécifications du futur utilisateur donc très peu standardisé. Il est donc nécessaire d’être flexible pour s’adapter au mieux aux  désirs  des  utilisateurs.

2. La production de masse. Dans ce cadre, le produit est plutôt standardisé et fabriqué en grande quantité. On vise les économies d’échelles et l’abaissement des coûts de – production.

3. La production en continu comme c’est le cas des entreprises du secteur chimique où on vise en général la fabrication dans un processus automatique d’un seul produit.

Ensuite, Woodward a proposé les prescriptions suivantes, qui portent plutôt sur les modes de contrôle qu’il conviendrait d’adopter au sein de son organisation.

  • Lorsque l’entreprise adopte un système de production à l’unité ou en petites séries, elle doit développer un système de contrôle direct ou par ajustement mutuel au sein des opérateurs du système. Les structures doivent par  conséquent  être  très  souples pour favoriser la flexibilité requise.
  • Si elle adopte au contraire un système de production de masse, les systèmes  de  contrôle beaucoup plus mécaniques sont alors adaptés. Ces modes de contrôle sont cohérents dans les structures formalisées.
  • Enfin si le système de production de l’entreprise est du type continu, il conviendrait de développer un système de contrôle plus impersonnel. Le haut degré d’automatisation  requise conduit à n’utiliser le personnel qu’à la surveillance des automatismes et à leur entretien.

Au moins deux remarques peuvent être faites sur les travaux de Woodward :

1. Premièrement, la typologie révélée débouche plutôt sur une échelle de technologie qui pose à son tour d’autres questions non résolues ! Comme  le  remarque  Desreumaux,  est-ce une échelle à complexité croissante ou une échelle de taux de changement ou de continuité ?

2. Deuxièmement, une lecture prudente des travaux  de  Woodward  conduit  à  insister  sur  la nuance suivante : il s’agit moins explicitement d’un déterminisme technologie/structure.

Ce n’est pas  la  technologie  qui  induit  la  structure  ou  les  modes  d’organisation mais plutôt les exigences de contrôle entraînées par la technologie, même si les exigences de contrôle peuvent faire partie de la structure. Le fait que  Woodward  n’ait  regardé que des entreprises  de  taille  relativement  modeste  pourrait  expliquer  la  nature  de cette relation. En effet. 40 % des entreprises étudiées avaient moins de 250 employés.

2.1.2. Les travaux de Perrow

Pour  ce  sociologue,  la  technologie  est  un  processus  de  transformation  d’input   en   output, nécessitant pour ce faire  des  machines,  informations,  outillage,  etc. 

Dans  cette  acception de la technologie, deux dimensions servent de base à son identification.

1. D’une part les canaux mis en œuvre pour assurer la transformation. Le problème traité requiert-il une recherche de solution  plus  ou  moins  intense,  selon  qu’on  est  plus  ou  moins habitué à ces problèmes et qu’ils sont plus ou moins maîtrisés.

2. D’autre part la variété des problèmes concernés selon qu’ils  comportent  peu  ou  beaucoup d’exceptions.

A partir de ces deux dimensions, la typologie de technologie a été proposée.

Figure. La typologie de technologie de Perrow

  • Le type Artisanat est caractérisé par une faible variété mais le processus de transformation n’est pas bien maîtrisé. Il n’existe pas un ensemble prédéterminé de procédures et de techniques à appliquer aux problèmes qui pourraient survenir. Le travail nécessite un professionnalisme et un entraînement car les décideurs répondent aux problèmes en grande partie sur la base de leur intuition et leur expérience. C’est l’exemple d’un athlète professionnel, des industries du bâtiment ou encore des acteurs sur les marchés financiers.
  • Le type Bureaucratie professionnelle est caractérisé  par  une faible complexité en dépit de sa grande variété, car le problème  reste  globalement  identique pour les professionnels. La complexité n’existe que pour le novice  car la somme de connaissances accumulées fait qu’on dispose  d’un  répertoire  d’analyse systématique et pertinente quelle que soit la variété des problèmes à résoudre. C’est le cas des cabinets  d’experts  comptables  et  fiscalistes,  des  hôpitaux,  des universités, etc.
  • Le type Routine est caractérisé par une faible variété des problèmes et l’utilisation de procédures claires et programmables dans la recherche de solution. La routine domine dans le travail. C’est l’exemple de l’activité d’audit d’une fonction dans la profession comptable.
  • Le type ingénierie est l’opposé du type routinier. Il est caractérisé par une grande variété des problèmes requérant une recherche de solution et la bonne solution à un problème ne peut pas être identifiée à travers un schéma d’analyse et de procédure établi. On ne peut prédire le cheminement vers la bonne solution. Ce type de technologie requiert beaucoup de capacité d’analyse. Exemples : l’activité de conception des politiques économiques ou l’activité d’analyse stratégique dans les grands groupes industriels.

Comme prescriptions organisationnelles, il convient de retenir de cette typologie qu’une recherche de solution intense couplée à un cadre de variété faible de problèmes à traiter est adaptée à une organisation  «  façon  artisanat  »  où  prédominent  l’adresse  et  l’habileté.     

Au contraire, une faible recherche de solution ne nécessite qu’une organisation bureaucratique.  Lorsque  la  recherche  de  solution est  intense  dans  un  contexte de forte variété de problèmes à traiter, une organisation décentralisée est  adaptée.  La  bureaucratie ne supportant pas les exceptions, elle est à éviter lorsque les problèmes sont trop variés.

GUILLEMTS-VERTS

« De vastes organisations produisent un sentiment d’impuissance chez l’individu, conduisant à une diminution de l’effort. Le danger peut être évité s’il est réalisé par les administrateurs, mais il est d’un genre que la plupart des administrateurs sont constitutionnellement incapables de réaliser. Dans chaque plan bien rangé pour organiser le modèle de la vie humaine, il est nécessaire d’injecter une certaine dose d’anarchisme, suffisamment pour empêcher l’immobilité conduisant à la décadence, mais pas assez pour provoquer des perturbations. »

Bertrand Russell,

2.1.3. Les travaux de Thompson

Thompson considère que la technologie se caractérise par une forme d’interdépendance entre activités et opérations. Trois types d’interdépendance sont alors identifiés :

1. Le type partagé : plusieurs unités d’une organisation se partagent une ressource tout en restant indépendantes les unes des autres. Exemple : les enseignants au sein d’une même université partageant les mêmes locaux mais donnant les cours individuelle­ ment aux étudiants.

2. Le type séquentiel : une unité produit un résultat qui est le point de départ du suivant. La fabrication à la chaîne constitue un exemple.

3. Le type réciproque : deux unités dépendent réciproquement l’une de l’autre pour accomplir leur tâche.

Cette typologie est présentée comme une variable explicative du mode d’organisation de l’entreprise. L’organisation se fait donc en termes de communication. Ensuite, on  lui associe des modes de coordination :

  • L’ajustement mutuel est utilisé pour le type réciproque.
  • La voie hiérarchique pour le type séquentiel.
  • Les plans ou les procédures pour le type partagé.

Au total, la technologie pose un problème non résolu de définition qui aurait pourtant  pu faciliter ou uniformiser son opérationnalisation. Est-ce tant pour sa difficulté ou pour son apparente évidence ? Personne n’ose véritablement définir la technologie. On devrait plutôt parler de technologies car les différents travaux la situent à plusieurs niveaux d’analyse : est-ce le poste de travail comme l’appréhende Perrow, le département ou l’unité de production, ou alors l’entreprise globalement considérée comme l’analysent Thompson  et  Woodward ?

2.2. La taille

La taille est un facteur interne de contingence de l’arrangement  structurel  d’une  organisation. Certains chercheurs ont en fait le point  central  de  leurs  travaux  en  s’appuyant  sur  une  régression  multivariée  d’échantillons  d’organisations  de  différentes catégories. L’idée  de  départ  consiste à comprendre les  problèmes  posés  au  niveau  du  groupe,  de  l’individu,  voire  de  l’organisation  elle-même,      à travers une étude  comparative  des  organisations. 

L’hypothèse  de  base  est  que  l’organisation structure le groupe qui lui-même structure l’individu. Ces travaux ont abouti à  une  contestation  de  la  primauté  de  la  technologie  comme  déterminant   des   structures, et souligné  l’importance  d’autres  facteurs  contextuels  et  principalement  la  taille  de  l’organisation. La taille d’une organisation a donc une incidence sur le choix de sa structure.

L’étude, qui a porté  sur  un  échantillon  de  cinquante-deux organisations  anglaises  peut  être résumée aux propositions ci-après.

  • La taille constitue la cause prédictive majeure de la structuration.
  • La concentration de l’autorité  est  une  fonction  du  degré  de  dépendance  de  l’organisation vis à vis d’une autre organisation.

Beaucoup d’autres travaux  ont  par  la  suite  confirmé  ces constats. C’est ainsi par exemple que Blau, à partir d’une étude  quantitative  des  agences  d’emploi américaines et de  leurs  sous  unités,  a  montré  que  l’accroissement  de  la  taille  d’une organisation entraîne une différenciation ou une plus grande bureaucratisation de ses structures.

2.3. La stratégie

Un troisième facteur de contingence interne est  la  stratégie.  Bien  que  des définitions plus précises puissent être données, la stratégie concerne essentiellement le mode de couplage de l’entreprise avec son environnement. Selon le niveau auquel on se situe, la stratégie peut être définie comme le choix de ses différents domaines d’activités (la stratégie d’entreprise), la façon de gérer chacun de ces domaines (la stratégie concurrentielle), ou encore l’emploi de ses ressources financières, humaines, techniques etc. (la stratégie fonctionnelle)

Pour la théorie de la contingence, la stratégie détermine les résultats de l’organisation, donc ses performances. Compte tenu du contexte, certaines stratégies donnent de bons résultats mais aussi, et surtout interagissent avec les structures.

Théorie-de-la-contingence

La  thèse  de  l’interdépendance  de  la  stratégie  et   des   structures   d’organisation   a  été mise en évidence par de nombreux travaux, qui ont privilégié des études longitudinales par intégration du temps au problème étudié.

Le travail majeur montrant l’interdépendance  entre  la  stratégie  et  la  structure  organisationnelle d’une entreprise est celui de Chandler. Chandler part de l’observation de 4 grandes  entreprises américaines entre 1860 et 1880, puis décrit la  façon  dont  elles  ont  maîtrisé  la  complexité  vécue  en  terme  d’organisation  pour  identifier  enfin  une  séquence  stratégie/structure.

Selon ces travaux, à une stratégie donnée dans la vie de l’entreprise doit correspondre  une  organisation  type.  Il  y  a  une  forte  relation  entre  certaines  formes  de  stratégie et les structures développées :

  • Un organe administratif émerge au sein de l’entreprise dès lors que celle-ci adopte une stratégie d’expansion en volume.
  • L’administration se renforce dès lors que l’entreprise adopte une stratégie d’expansion géographique, c’est-à-dire lorsqu’elle multiplie ses sites d’implantation.
  • Les structures fonctionnelles  correspondent  aux  stratégies  d’intégration    L’entreprise reste dans la même industrie mais incorpore certaines des tâches de ses fournisseurs ou de ses distributeurs.
  • Les structures  divisionnelles  sont  très   liées   aux   stratégies   de   diversification,   c’est-à-dire au développent d’activités nouvelles.

Cependant, afin d’éviter toute caricature dans la séquence énoncée par Chandler, il convient de préciser que les entreprises ne changent pas de structure s’il  n’y  a  pas de mauvaise performance. C’est donc au fond la perte d’efficience occasionnée par la nouvelle stratégie qui entraîne la volonté de changement d’organisation. Une nouvelle stratégie pouvant  entraîner  de  nouveaux  problèmes  administratifs  non  maîtrisés  qui  conduisent  à  une  baisse de performance. La recherche d’une nouvelle structure conduit donc à restaurer      ces performances.

L’analyse de Chandler a fait l’objet de vérifications empiriques aux Etats-Unis, en Allemagne, en France, en Grande-Bretagne, en Italie et plus  récemment  au Japon.

Les résultats de Chandler ont également été critiqués, mais la plupart des critiques résultent d’une lecture caricaturale de ces écrits, qui présente ses travaux comme une démonstration de l’hypothèse selon  laquelle  la structure est déterminée par la stratégie.

En  fait, Chandler a  affirmé  que  stratégie  et  structure  sont  interdépendantes,  et  donc  qu’il  n’y a pas plus de raisons de dire que la stratégie détermine la structure plutôt que l’inverse. D’ailleurs, Bower a montré que dans de nombreux cas,  les  choix  stratégiques  sont  fortement conditionnés par les structures organisationnelles dans lesquelles évoluent les décideurs. La structure établit le cadre de  réflexion,  impose  les  frontières  de  la  rationalité  et filtre les décisions.

3. Les facteurs externes

Parallèlement aux facteurs internes de contingence, de nombreux travaux relevant du déterminisme contextuel ont aussi mis en avance l’influence de certains facteurs externes comme l’environnement ou la culture nationale dans le choix et le succès des structures organisationnelles.

3.1. L'environnement

L’environnement a été présenté comme un des principaux déterminants structurels des entreprises. A cet égard, deux conceptualisations de l’environnement sont à retenir.

D’une part l’environnement caractérisé en termes d’acteurs, d’autre part l’environnement caractérisé en termes d’attributs.

  • Description de l’environnement en termes d’acteurs. Dans cette première approche, l’environnement est  appréhendé  à   plusieurs      Tout   d’abord   par énumération  des acteurs avec lesquels l’entreprise est en relation : clients, syndicats, fournisseurs, etc. Au-delà de cette façon tout à fait classique d’appréhender le sujet, plusieurs dimensions   peuvent  tout  aussi  être  considérées  pour  cerner  l’environnement. 

Il  peut   s’agir  de  la  dimension  économique,  de  la  dimension  politique,  de  la  dimension  culturelle ou scientifique. Au  total,  ces  dimensions  touchent  aux  éléments  qui  ne  relèvent  pas du quotidien.  Enfin,  des  éléments  tels  que  la  responsabilité  sociétale  constituant  des germes de changement peuvent aussi être considérés comme caractérisant l’environnement.

  • L’environnement appréhendé  en termes d’attributs  ou  caractéristiques.  Selon  cette  approche, l’environnement se caractérise par les  problèmes  de  gestion  auxquels  l’entreprise aura à faire face. Ainsi, un environnement simple ou complexe, hostile ou accueillant, turbulent ou paisible entraîne des façons de façons différentes de traiter les problèmes. Deux grands classiques illustrent cette approche. Il s’agit de la typologie d’Emery et Trist et celle de Duncan.
GUILLEMTS-VERTS

« La nature de l’environnement commercial mondial garantit que, quels que soient nos efforts pour créer une organisation stable et saine, notre organisation continuera à connaître des changements spectaculaires bien au-delà de notre contrôle. »

Margaret J.Wheatley

 

Une fois ce facteur caractérisé,  il  est  possible  de  montrer  l’impact  de  cette  variable  sur les structures d’organisation à travers quatre typologies parmi les plus célèbres.

3.1.1. La typologie d’Emery et Trist

A  partir  d’une  enquête  sur  un  échantillon  d’entreprises,  Emery  et  Trist  aboutissent  à   une typologie des environnements selon leur taux de changement. Chaque environnement constituant une trame causale pour la structure de l’organisation. Quatre types d’environnements sont alors proposés :

  1. Environnement stable aléatoire : les composants constitués par cet environnement changent peu et sont faiblement connectés.
  2. Environnement stable structuré : il y a peu de changement de ces composants mais ceux-ci sont clairement agencés d’une certaine manière.
  3. Environnement instable réactif: un dynamisme prévisible et organisé existe au sein de ces composantes dynamisme moins prévisible existe au sein de ces composantes.
  4. Environnement turbulent : un dynamisme moins prévisible existe au sein des composants de l’environnement, tant pris individuellement que dans leurs relations d’interconnexion

3.1.2. La typologie de Duncan

Ce n’est pas une typologie qui procède d’une démarche conceptuelle comme précédemment. Duncan a plutôt utilisé une démarche empirique, par interrogation des acteurs  d’un ensemble d’entreprises industrielles.

L’idée de base est que pour comprendre le fonctionnement d’une entreprise, il convient de considérer l’environnement tel qu’il est perçu. Pour Duncan, l’environnement n’est donc pas une donnée objective. D’une part, le nombre  de facteurs ou de composants considérés, traduisant la complexité ou la  simplicité  et  d’autre part, le taux de changement qualifié de statique ou dynamique constituent  les  repères qui permettent de caractériser l’environnement.

L’environnement  perçu  est  alors soit stable ou complexe, soit statique ou dynamique. 4 environnements perçus sont ensuite proposés comme le montre le tableau ci-dessous :

Figure. Typologie de Duncan (1972), adapté de Desreumaux (1992)

  1. Un environnement à faible incertitude perçue se caractérise par un faible nombre de composants qui changent peu
  2. Un environnement à incertitude perçue modérément faible se traduit par un grand nombre de composants certes hétérogènes mais qui ne change pas beaucoup.
  3. Un environnement à incertitude perçue modérément forte renvoie à un faible nombre de composants ou de facteurs mais qui changent souvent.
  4. Un environnement à forte incertitude perçue quant à lui se caractérisé par un grand nombre de composants, hétérogènes, de plus en continuel changement.

3.1.3. Les travaux de Burns et Stalker

Burns et Stalker ont étudié comment l’environnement influençait les structures organisationnelles à partir d’une enquête sur une vingtaine de compagnies industrielles anglaises  de tous secteurs d’activités (fabrique de fibres de rayonne, appareillage électrique, télévision et électronique).

Sur la base de l’appréciation de l’environnement par le taux de changement de technologie et du marché, ils sont parvenus à distinguer cinq types d’environnement : du plus stable (pas de changement dans la technologie et le marché) au moins prédictible (très grand changement à la fois dans la technologie et le marché)

En guise de résultat, Burns et Stalker  ont  énoncé  que  la  structure  d’une  organisation  dépend des facteurs externes, qui sont eux-mêmes se traduisent par l’incertitude de l’environnement dont la mesure est faite à l’aide des taux de changement  de  la  technique  et  du  marché :

  • La structure d’organisation de type mécaniste, celle qui correspond donc à l’organisation bureaucratique décrite par Weber convient mieux           à un environnement stable.                                             
  • La structure d’organisation de type organique, à l’opposé de la précédente, convient à un environnement instable.

Il convient de souligner qu’en réalité,  ces  deux  types  de  structures  constituent  des  types extrêmes d’un continuum de configurations.

GUILLEMTS-VERTS

« Devant qui les entreprises sont-elles vraiment responsables ? Leurs clients ? Leurs actionnaires? Leurs employés? Nous dirions que ce n’est rien de tout cela. Fondamentalement, les entreprises sont responsables de leur base de ressources. Sans un environnement sain, il n’y a pas d’actionnaires, pas d’employés, pas de clients et pas d’entreprise. »

Yvon Chouinard

3.1.4. Les travaux de Lawrence et Lorsch

Ces     deux   professeurs d’organisation à Harvard  ont donné entre 1967 et 1979 une forme plus achevée aux travaux expérimentaux de Burns et Stalker. Ils ont essayé de répondre à la question suivante : Quelles sortes d’organisation son nécessaires pour faire face aux différents environnements de l’entreprise ?

Ils ont tiré leurs conclusions d’une étude expérimentale entre 1963 et 1966 sur 10  entreprises aux États  Unis, dont 6 entreprises chimiques, 2 entreprises  d’emballage et 2 entreprises alimentaires. Ces entreprises ont été choisies parce qu’elles montraient des différences importantes sur  les  caractères  d’incertitude  et  de  diversité  de  leur  environnement  respectif. 

L’industrie  plastique  chimique  est  hautement  compétitive  et  les  cycles  de    vie  des  produits  y  sont  historiquement  court.  Les  entreprises   doivent   développer   un nombre considérable de produits et  de  procédés  nouveaux.  L’environnement  y  est  donc  qualifié de variable et dynamique.

En revanche, l’industrie d’emballage  n’a  pas  connu  de  nouveau produit depuis plus de vingt  ans  à  cette  époque.  La  croissance  des  ventes  est  limitée au taux de croissance de la population et au produit national brut. L’environnement est donc relativement certain et sans menaces importantes.

Entre  ces  deux  extrêmes  situent les entreprises de conserves alimentaires.

Dans un premier temps, Lawrence et Lorsch ont analysé la relation entre l’incertitude de l’environnement de l’(organisation (le taux de changements technologiques) et sa structure interne sous l’hypothèse que la structure de chaque sous-système de l’entreprise devait varier avec l’incertitude de son propre environnement. Ils ont sont parvenus à la conclusion que plus grand devait être le degré de certitude de l’environnement, plus formalisée devait être la structure.

Ils ont ensuite observé comment les différences  dans  les  sous  environnements  génèrent  es   structures   différentes,   comment  elles   différencient   l’organisation   et  ils  ont  constaté que plus  les  sous-systèmes  sont  différenciés,  plus  il  faut  trouver  des  instruments  pour les  intégrer,  d’où  la  règle  d’organisation  suivante  :  plus  l’environnement  est  turbulent,  complexe, incertain, divers, plus les  organisations doivent être diversifiées, mais plus elles sont différenciées sur le plan  interne,  plus  elles  ont  besoin  de  mécanismes  d’intégration  pour coordonner l’action des différents départements

3.2. La culture nationale

L’impact de la culture nationale sur les structures organisationnelles  suscite  de  nombreuses controverses, comme le note Desreumaux.

Certains nient l’influence des cultures nationales sur  les  organisations.  Par  exemple,  pour ce courant, quel que soit le pays, plus une organisation est grande, plus elle est diversifiée. Les cultures ne sont pas importantes dans cette acception des choses.

GUILLEMTS-VERTS

« Pour survivre dans les temps modernes, une entreprise doit avoir une structure organisationnelle qui accepte le changement comme principe de base, laisse prospérer les coutumes tribales et favorise un pouvoir qui découle du respect et non des règles. En d’autres termes, les entreprises qui réussiront seront celles qui accorderont la priorité à la qualité de vie. Faites ceci et alors le reste (la qualité du produit, la productivité des travailleurs, les profits pour tous) suivra. »

Ricardo Semler

D’autres travaux  ont  contesté  cette  thèse  en  considérant  la  culture  comme  une  variable de performance. Elle constitue soit un système de valeurs ou alors de façon élargie une référence institutionnelle. Les différences entre les  organisations  sont  plutôt   expliquées plus par le système d’éducation, la promotion. 

Ainsi,  Child  et  Kieser  ont  mené  une  étude empirique comparant les entreprises allemandes et britanniques.  Les  entreprises présentent d’un pays à l’autre des spécificités entraînées par les cultures respectives. En Allemagne, on constate un moindre formalisme du rôle managérial, contrairement à ce qui passe en France.

De même les travaux de Hofstede, s’appuyant sur une analyse de données d’un vaste échantillon révèlent quatre dimensions clés permettant de caractériser une culture nationale :

  1. Le degré d’individualisme traduisant les forces des relations entre les individus.
  2. La distance hiérarchique, c’est-à-dire la façon dont la société traite les inégalités.
  3. Le contrôle de l’incertitude, selon qu’on veut créer la sécurité ou accepter l’incertitude, le contrôle de l’incertitude est fort ou respectivement faible.
  4. La masculinité et la féminité qui traduisent la valorisation de la réussite ou de la domination par opposition (pour la masculinité), et la minimisation de la division et la valorisation de l’aide et de la modestie (pour la féminité).

En s’appuyant principalement sur la distance hiérarchique et le contrôle de l’incertitude, Hofstede caractérisa la nature des structures organisationnelles développées.

  • Lorsque la distance hiérarchique est forte et que les institutions cherchent  à  créer  la  sécurité, il y a développement de  structures  hiérarchisées.  C’est  le  cas  dans  les  pays  latins, comme en France,  ou  encore  au    Un  faible  contrôle  de  l’incertitude  débouche au contraire sur des structures de type « famille », comme en Afrique.
  • Lorsque la distance hiérarchique  est  faible  dans  un  contexte  de  contrôle  de  l’incertitude ce sont des bureaucraties impersonnelles qui se  développent  comme  en  Europe centrale ou en Allemagne, au contraire des pays nordiques  et  anglo-saxons  qui  développent des adhocraties, dans un contexte de faible contrôle de l’incertitude.
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