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Fidélisation des clients : Les pièges et les règles

La fidélisation, reconnue comme objectif indispensable de toute stratégie de relation client, ne se limite pas à de simples programmes promotionnels. Certains pièges sont à éviter ; certaines règles doivent être respectées.

Il est impératif pour chaque entreprise de fidéliser ses clients à long terme afin de pouvoir survivre avec succès sur le marché et se développer. Les entreprises utilisent diverses mesures et instruments dans le but d’élargir ainsi la clientèle. Ces méthodes peuvent être adaptées en fonction de l’industrie ou de la taille et du type d’exploitation.

1. L’importance de la fidélisation des clients

L’importance et l’efficacité de la fidélisation client pour une entreprise sont souvent sous-estimées. La fidélisation à long terme de la clientèle est évidente : Elle apporte une contribution décisive au chiffre d’affaires d’une entreprise. Ceux qui parviennent à transformer des acheteurs ponctuels en clients réguliers sont plus susceptibles de conserver leur entreprise sur le marché. Parce que les clients sont la clé pour qu’une entreprise réussisse et génère des ventes.

Reconnue comme objectif indispensable  de  toute stratégie de relation client, la  fidélisation est trop souvent associée à des programmes promotionnels aux effets douteux. Autre contresens, l’opposition fréquemment exprimée entre acquisition et fidélisation : les deux sont bien complémentaires.   

GUILLEMTS-VERTS

« Il n’y a qu’un patron: le client. Et il peut licencier tout le personnel, depuis le directeur jusqu’à l’employé, tout simplement en allant dépenser son argent ailleurs. »

Sam Walton

L’entreprise qui parvient à faire de ses clients ses meilleurs alliés génère une partie des flux d’acheteurs potentiels par le rôle de prescription qu’ils pourront jouer auprès de leur entourage.

Pour concilier efficacement fidélisation et acquisition, l’entreprise  doit  réaliser  un   arbitrage subtil prenant en compte des facteurs aussi variés que la maturité du marché sur lequel elle opère et son niveau de pression  concurrentielle;  l’existence  de  barrières  à l’entrée ou à la sortie (autrement dit le «risque» ou le « coût » induits pour le  client).

L’arbitrage concernera aussi la  nature  plus  ou moins différenciée des offres de produits et  de  services ; le taux de réachat (Pourcentage des clients d’une marque ou d’un produit qui ont racheté au moins une fois la marque ou le produit sur la période) plus ou moins faible; la valeur potentielle des clients, la répartition des profits qu’ils génèrent ou encore le taux d’attrition (perte de clients) de l’entreprise au regard de celui du secteur et des principaux concurrents…

Avec l’essor des achats en ligne et la facilité à comparer les offres sur Internet en quelques « clics », cette tendance des consommateurs au «zapping» d’une marque à l’autre s’est encore accentuée…

Combien d’entreprises se lancent aujourd’hui dans des stratégies de fidélisation de leur clientèle qui se soldent par des demi-succès, voire par de sérieux échecs.

Certains pièges peuvent pourtant être évités en respectant quelques règles qui permettront de construire une stratégie gagnante.

2. Les 3 pièges à éviter

L’exemple du marché de la téléphonie mobile est significatif. Les opérateurs se livrent   une guerre sans merci pour l’acquisition et la fidélisation du client, En France au cours de l’année 2012, par exemple, en dépit des nombreux programmes de fidélisation déployés par les opérateurs, l’arrivée de l’operateur Free a causé quelques inquiétude chez les opérateurs établis, Orange, Bouygues Telecom et SFR.

Le lancement des nouveaux forfaits Free mobile a eu un impact quasi-immédiat sur les clients des opérateurs concurrents. Orange affiche au cours du premier trimestre 2012, une perte de près 2,5 millions de clients. Bouygues Telecom avait enregistré sur la même période plus de 500.000 résiliations parmi lesquelles 135.000 ont basculé vers l’opérateur Free. SFR pour sa part, a estimé à près de 200. 000 sa perte de clients.

Sur un marché mature, principalement de renouvellement, avec de nouveaux entrants potentiels, voire une nouvelle technologie, certains opérateurs envisagent même des taux d’attrition jusqu’à 25%, voire 30%,  d’ici deux à trois ans ! En fait,  le  déploiement de stratégies de fidélisation mal définies peut être contre-productif et générer alors surcoûts  et   insatisfaction  clients.

Ainsi, en  2017, 40 % des clients américains de la téléphonie fixe se déclaraient «découragés et  insatisfaits»  par   les   programmes  de fidélisation mis en  place  par les opérateurs. 

Voici  quelques  pièges   de base qui peuvent être déjoués.

2.1. Piège n° 1 : construire sur du sable

Trop   d’exemples  montrent des entreprises proposant des programmes de fidélisation particulièrement sophistiqués, alors que le service offert au client ne répond pas à un niveau minimal de qualité. L’entreprise risque ainsi d’accroître le niveau d’attente et de créer un décalage inacceptable avec le vécu journalier.

Le cas de la téléphonie mobile américaine éclaire encore ce propos puisque 45 % des clients résidentiels et 29 % des clients professionnels se disent prêts à changer d’opérateur d’abord en raison de la faiblesse du service clients. Dans un tel contexte, le déploiement d’une stratégie de fidélisation  ponctuelle risque d’avoir des effets contre-productifs.

GUILLEMTS-VERTS

« N’essayez pas de dire au client ce qu’il veut. Si vous voulez être malin, soyez malin sous la douche. Ensuite sortez, allez travailler et servez le client ! »

Gene Buckley

2.2. Piège n° 2 : Ne pas cibler les clients

Qui doit-on fidéliser en priorité sans établir une analyse préalable de la valeur actuelle et potentielle des clients pour l’entreprise ? Le déploiement de politiques de fidélisation fondées sur un ciblage approximatif des clients peut très vite devenir coûteux, et  encore une fois générer de l’insatisfaction  chez les clients.

Citons le cas de cette compagnie pétrolière qui proposait une offre de fidélisation très généreuse à l’attention de tous ses clients au travers d’une assistance routière gratuite en l’échange du paiement d’un plein tous les quinze  jours. Le  programme  a  touché  800.000 clients et s’est soldé par une perte nette de plusieurs dizaines de millions de francs.

Philip Kotler  est connu dans le monde entier comme le « père du marketing moderne » Il a été honoré comme l’un des plus grands penseurs du marketing au monde. Pendant plus de 50 ans, il a enseigné à la Kellogg School of Management de la Northwestern University. Le livre de Kotler Marketing Management est le manuel de marketing le plus largement utilisé dans le monde. Il est l’auteur de plus de 80 livres.

« Il n’y a qu’une seule stratégie gagnante. Il s’agit de définir avec soin le marché cible et de diriger une offre supérieure vers ce marché cible. »

Les difficultés rencontrées pour identifier les clients dignes de relations à long terme peuvent  être  diverses.  Au-delà de la prise de conscience de la  nécessité d’une analyse de la valeur des clients, notamment en termes de rentabilité, l’information concernant les clients reste parfois difficile à récupérer et à consolider.

Le cloisonnement de cette information au sein  de  l’entreprise est un obstacle courant, et rend difficile une analyse cohérente de la valeur clients. Sans  intégration de cette information, notamment au niveau des points de contact clients (points de vente, service après-vente, service facturation ou recouvrement des impayés…), la construction d’une vision consolidée des clients et de leur valeur n’est pas possible.

2.3. Piège n° 3 : fidéliser par « à-coups»

Trop souvent, les offres de fidélisation sont insuffisamment attractives ou trop sporadiques. Elles auront, dès lors, peut-être un effet à court terme, mais permettront rarement une fidélisation sur la durée. On peut citer certaines offres « coup de poing » qui s’appuient sur une simple réduction du prix de l’offre de produits et services.

Certains se souviendront peut être de ce bon exemple qu’est le cas d’une chaîne de supermarché anglaise qui a vu son programme de fidélisation se solder par un échec notoire à la fin des années 90. Proposant exclusivement des offres de réduction de prix, ce programme a certes réussi à toucher près de 8,5 millions de clients mais au prix d’un investissement de près de 30 millions de livres sur quatre ans.

Sans revêtir ce caractère très offensif et ponctuel, les offres de type «club» assurent rarement une fidélisation durable des clients, mais pour d’autres raisons. On les retrouve notamment dans la téléphonie mobile, où elles s’adressent à tous les abonnés d’un opérateur en leur proposant des avantages sans lien direct avec l’offre de produits et services.              

Les clients sont dès lors fidélisés à l’avantage proposé plus qu’aux produits et à la marque. Sans élément de différenciation fort, les offres deviennent interchangeables pour les consommateurs.

Enfin, certaines entreprises ont parfois recours à des solutions de fidélisation que l’on peut qualifier de « coercitives » en créant des contraintes telles que le client va finir par se sentir captif de la marque, parfois contre son gré ! Ainsi, les clauses de souscription à certains forfaits de téléphonie mobile (durée minimale d’abonnement, reconduction tacite de l’abonnement…) peuvent parfois être perçues comme tel par les clients.

Ces quelques exemples montrent l’importance d’une vraie réflexion en amont de toute démarche de fidélisation. Quels clients fidéliser en priorité ? Quelle(s) offre(s) leur proposer ? Par quels moyens ? Quels vont être les impacts sur mon organisation ?

3. Les 3 règles pour une fidélisation réussie

fidélisation

Lorsqu’un client a effectué un achat, vous est-il dorénavant acquis ? Entrera-t-il en contact avec vous par lui-même ou fera-t-il une recommandation ici et là ? Il vous connaît maintenant, vous, vos produits et vos réalisations et sait ce qu’elles valent – à partir de maintenant, cela fonctionnera-t-il presque automatiquement ?

Rien n’est aussi sûr. Alors comment s’y prendre ?

3.1. Règle N° 1. Etre sélectif

Nous  l’avons dit, les clients ne contribuent pas tous de la même manière à la rentabilité de l’entreprise. Ainsi, 20 % des clients de la téléphonie mobile française représentent de 50% à 60% des revenus des  opérateurs.

La fidélisation doit donc  être sélective, en dérivant toute action de fidélisation d’une analyse marginale de la valeur clients. Cela passe par une démarche de segmentation et l’étude de la «Customer life- time value» des segments de clients identifiés. Ce terme désigne la valeur vie d’un client (métrique qui vous donne la somme des profits nets rapportés par un client tout au long de son activité commerciale avec l’entreprise).

Cette analyse prend en compte trois éléments clés : la rentabilité actuelle de chaque segment/client, leur propension à demeurer fidèles, et l’extrapolation des coûts/bénéfices associés à chacun d’entre eux tout au long de la relation (cycle de vie).

3.2. Règle n° 2 : proposer une offre de fidélisation attractive et véritablement innovante

Les solutions de fidélisation sont nombreuses, mais toutes n’ont pas le même impact. L’entreprise peut arbitrer, en fonction de ses objectifs, de la nature du marché et des clients, entre différentes options : des avantages immédiats (cadeaux offerts à l’achat, coupons de réductions, réduction pour l’accompagnant, etc.) souvent axés sur la valeur et le prix.

L’enquête menée par PricewaterhouseCoopers fait ressortir les 2 deux principales raisons citées par les clients des entreprises du marché de consommation pour changer de marque : « Une mauvaise expérience avec un produit ou service (40%) ou avec le service client (34%). Les clients sont encore moins tolérants vis-à-vis des compagnies aériennes et des hôtels en raison des engagements financiers plus élevés généralement en jeu. Plus de la moitié (52%) changeront à cause d’une mauvaise expérience avec un produit ou service et 45% le feront à cause d’une mauvaise expérience avec le service client. »

Il peut s’agir aussi de privilèges, offrant des bénéfices immatériels aux clients (caisses réservées, systèmes de priorité ou de «coupe-file», assistance ou information spécifique, service après-vente privilégié…), ou encore de récompenses différées dans le temps, qui cherchent à instaurer une relation durable avec les clients les plus rentables et les plus susceptibles de prolonger leur relation avec la marque.

GUILLEMTS-VERTS

« L’expérience client est le prochain champ de bataille concurrentiel. C’est là que les affaires vont être gagnées ou perdues. »

Tom Knighton

Cela est notamment le cas des programmes fondés sur l’accumulation de points fidélité.

Quel que soit le choix de l’offre retenue, son intérêt pour les clients est fonction de cinq attributs déterminant sa valeur globale perçue :

  • La valeur perçue de la prime éventuelle ou valeur nette,
  • Son attrait,
  • Son accessibilité dans le temps,
  • La liberté laissée au client dans le choix des options
  • La simplicité du programme.

En France, pour construire sa carte « UGC illimité  »,  la  société  UGC, (Union Générale Cinématographique), groupe audiovisuel français spécialisé dans l’exploitation cinématographique s’est  en  partie  appuyée  sur  ces  principes  clés.  En mars 2000 le groupe UGC a lancé une nouvelle formule d’abonnement à entrées illimitées baptisée « UGC illimité » au tarif de 98 francs par mois (14,94 €) et valable pour une année.

Cette offre de  fidélisation  a  réellement  créé  un  précédent sur le marché français des salles de  cinéma  en proposant un concept  fortement  innovateur  « d’abonnement au cinéma » (un accès illimité au réseau des 350 salles relevant de l’UGC.

Par  sa  simplicité,  son  attrait,  elle  a  séduit  près  de  200.000 abonnés  en  moins  d’un  an.  Cette  offre  a  permis  à  la  société  UGC  de  conforter  son  rôle  de  leader,  en bouleversant  les  règles  du  jeu  commercial  d’un  marché  mature  sur  lequel  les  positions  des  acteurs   étaient relativement figées. En dix  mois  de  fonctionnement, l’augmentation du nombre  d’entrées  dans  les  salles UGC a permis  un  gain  de  5  %  de  parts  de  marché pour la  chaîne.

En  parallèle  d’actions  de  recrutement continues, la création d’une base de clients abonnés, va permettre de développer des actions de fidélisation ciblées et de construire une véritable démarche de marketing relationnel.

Le bureau de consulting, PricewaterhouseCoopers fait ressortir les facteurs déterminants pour attirer et retenir des clients.

LE PENTAGONE MAGIQUE DE LA FIDÉLISATION

Fig. Le polygone de fidélisation

Source : PricewaterhouseCoopers

3.3. Règle n° 3 : anticiper les coûts induits

Les enjeux que nous venons d’évoquer mettent en évidence la nécessité de bâtir sa stratégie de fidélisation sur une vision consolidée des clients et de leur valeur pour l’entreprise.

Deux principaux axes d’action sont à considérer ici. D’une part, l’opportunité d’intégrer les bases de données opérationnelles de l’entreprise (ventes/facturation, marketing, finances, après-vente…) dans une base de référence de type «entrepôt de données».           

D’autre part, l’intérêt d’exploiter toutes les opportunités de contact clients pour recueillir de l’information les concernant. Cette base permet une traçabilité de la relation client dans le temps et  l’identification  des  profils  de  clients  rentables et non rentables pour la marque, qui va  déterminer le choix des cibles à fidéliser.

Dans le cas de la  carte «UGC illimité», l’information client est captée dès la souscription de l’abonnement en salle via un système intranet avec une mise à jour instantanée de la base de données clients. La consommation de chaque carte est enregistrée et permet de suivre, en temps réel, le nombre et la nature des films vus, la salle etc. Autant d’éléments qui permettent de nourrir une démarche de fidélisation tenant compte des habitudes et du profil de consommation des clients.

Conclusion

Au-delà des facteurs clés de succès évoqués pour  fidéliser ses clients, l’entreprise  qui veut réussir une stratégie gagnante  doit  être  capable  de se montrer innovante. UGC en est une bonne illustration. Précéder les attentes de ses clients, les surprendre à quelques moments clés de leur relation avec la marque, telle doit  être la ligne directrice. 

La montée en puissance des achats en ligne peut amener à s’interroger sur la pertinence des principes cités. L’expérience de PricewaterhouseCoopers dans le domaine montre que la  fidélisation  sur  Internet n’échappe pas à ces quelques règles.

Outre des mécanismes promotionnels et marketing devant entretenir l’intérêt et le  désir  de  revenir  vers  le  site  d’une marque, il convient de privilégier des services et un contenu éditorial de  qualité,  différenciant  et  reposant sur une connaissance approfondie des habitudes de consommation des internautes sur le Web et dans le monde «réel».

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